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samedi, 04 avril 2020

Vishnou à la rescousse ! - Le Covid vu par une Française en Inde - 04.04

  • Nombre de cas en France : 68 605 (7 532 morts)
    • Jour de confinement : 18
  • Nombre de cas en Inde : 2 902 (68 morts) 
    • Jour de confinement à Gurgaon : 13 / National : 11

Hier, le Premier Ministre indien a fait une nouvelle déclaration. Une grande déclaration ! Les Indiens sont invités, dimanche 5 à 21 heures, à éteindre les lumières et allumer des bougies pendant 9 minutes, tout en restant chez eux et respectant la distanciation sociale. “When the nation is fighting such a huge battle, one should from time to time keep experiencing this collective superpower manifesting itself in the form of the people. This experience boosts our morale, gives us direction and clarity, a common aim as well as the energy to pursue the same.” (« Alors que la nation mène une telle bataille, il faut de temps en temps continuer à faire l’expérience de cette superpuissance collective qui se manifeste sous la forme du peuple. Cette expérience renforce notre moral, nous donne direction et clarté, un objectif commun ainsi que l’énergie nécessaire pour le poursuivre. »

Les blagues vont bon train sur tweeter même si c’est par ailleurs interdit de faire circuler quoi que ce soit de faux ou susceptible de créer  sur le coronavirus sous peine de prison (source).

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Modi, véritable fan de l'effet de surprise, a déclaré le confinement national à 20 heures, effectif à minuit. Mais il prévient 3 jours à l’avance pour les bougies. Après le rendez-vous au balcon pour taper dans des casseroles du 22 mars, les bougies du 5 avril, certains font des prédictions pour la prochaine annonce de Modi (les rangolis sont des dessins faits en poudre colorée (de riz, de farine, de calcaire etc. devant les portes pour protéger les maisons et les rendre plus belles) :

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Pourquoi 9 minutes ?

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Je suis sûre que c'est un fake, faut pas croire tout ce qu’on raconte, même si mon Indien préféré s'est laissé prendre. Par ailleurs, d’autres avertissements circulent : attention au massacre si les gens allument des bougies avec du gel sur les mains !

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Blague à part, que font les Indiens quand ils sont confinés ? Ils se payent un solide retour aux sources, en demandant à la télé nationale de rediffuser les épisodes de Ramayan, réalisés en 1987. Le Râmâyana commence par la plainte de la Terre dévastée – tiens tiens, ça te rappelle rien ?? – qui, sous la forme d’une vache (Prithvi), s’adresse à Vishnou et le met en face de sa responsabilité. Vishnou va alors descendre sur Terre, sous la forme du prince Rama (son septième avatar), et vivre une véritable épopée, notamment après l’enlèvement de sa femme Sita par un démon sri-lankais. Voici l’épisode 1 avec sous-titres anglais :

Quand les temps sont durs, on se tourne vers les dieux, et on allume des bougies – ce qui, d’ailleurs, est fait chaque année lors du festival de Diwali, pour célébrer le retour de Rama vainqueur, la victoire spirituelle de la lumière sur l’obscurité, et la suprématie du bien sur le mal. La boucle est bouclée, Modi a entendu le peuple – ils seraient 170 millions à regarder Ramayana matin et soir depuis le début de la rediffusion sous la demande populaire – et leur offre un festival de lumière un peu en avance.

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Que Vishnou soit avec les Indiens et moi !

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lundi, 28 octobre 2019

Le Cachemire pour les nuls

Le Cachemire est une « petite » région montagneuse au nord de l’Inde où il fait bon vivre. Normalement.

D’abord centre de l’hindouisme puis du bouddhisme, le Cachemire a connu son premier dirigeant musulman en 1339. Il est ensuite passé entre les mains des Mogholes, des Afghans et des Sikhs.

En 1846, à l’issue de la première guerre Anglo-sikhe, le Cachemire a été cédé par les Sikhs à l’Angleterre, qui en fit un État indépendant. En raison de sa taille – c’était le deuxième territoire des Indes (à peu près un tiers de la France, pour 10 millions d’habitants) –, les Britanniques n’avaient pas vraiment les ressources de l’occuper et ils le vendirent à Gulab Singh, lui-même hindou. La vraie indépendance ne fut que de courte durée car une dizaine d’années plus tard, cet État princier fut mis sous la souveraineté de l’Angleterre, et ce jusqu’en 1947.

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Au moment de la partition, les Anglais demandèrent aux Etats de leur Empire de choisir leur camp : musulman (Pakistan) ou hindou (Inde). À ce moment-là, le Cachemire est un État à majorité musulmane dirigé par un Maharajah hindou qui, lui, préfèrerait tout bonnement l’indépendance, ni indien ni pakistanais. Ce fut donc le statu quo, l’attentisme, d’août à octobre 1947. Mais ça titillait dur Indiens et Pakistanais d’annexer cette région, et ce sont ces derniers qui cédèrent les premiers à la tentation. Le Cachemire demanda alors de l’aide à l’Inde, qui n’accepta qu’à la condition que le Maharajah signe l’accession du Cachemire à l’Union indienne. Avec toutefois un petit bémol : le Cachemire conserva le pouvoir d’avoir une constitution séparée, d’avoir son propre drapeau et d’être autonome quant à son administration interne. Mais surtout, seuls les Cachemiris avaient le droit d’acheter des terres dans la région.

Fin. Ou début de la débâcle pour cette région désormais disputée et « occupée » par l’Inde, le Pakistan et la Chine (qui a profité des échauffourées pour s’immiscer dans le conflit dans les années 60). L’Inde administre l’État du Jammu-et-Cachemire, le Pakistan les territoires de l’Azad Cachemire et du Gilgit-Baltistan et la Chine la région de l’Aksai Chin et la vallée de Shaksgam.

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En août 2019, l’Inde a décidé de retirer à la région du Cachemire qu’elle administre son statut spécial (le fameux article 370), dans l’esprit « t’es Indien ou tu l’es pas » – même si l’Inde n’a pas jugé nécessaire de poser la question au peuple cachemiri (on voit ce que ça a donné avec le Brexit, hein), et a préféré y aller manu militari (c'est-à-dire en isolant la population, coupant les télécommunications etc. pendant plusieurs semaines, la région étant une poudrière, les droits de l'homme ne font pas le poids).

Prochaine étape annoncée : récupérer la partie contrôlée par le Pakistan (article). À l’heure où le monde craint les attaques terroristes des extrémistes musulmans, M le Modi n’a pas froid aux yeux.

Au-delà des idéologies nationalistes et religieuses – disons que le conflit de février 2019 entre l’Inde et le Pakistan mené haut la main par le Premier Ministre lui a en grande partie valu sa réélection en mai – la région est aussi importante en termes de ressources d’eau. Surtout pour le Pakistan. Le Pakistan dépend entièrement de l’Indus pour son réseau hydrographique – d’ailleurs, peu après l’indépendance, l’Inde a fermé certains robinets (intentionnellement ou pas, on ne sait pas) et le Pakistan l’aurait senti passer.

Le bassin hydrographique de l’Indus est divisé entre le Pakistan, qui représente environ 60% de la superficie du bassin versant, l’Inde (20%), l’Afghanistan (5%) et le Tibet (15%). L’Inde dépend de l'Indus au nord-ouest (Punjab, Haryana, Rajasthan) et du Gange au nord-est. L’Indus prend sa source au Tibet, traverse le Ladakh, passe par le PoK (le Cachemire occupé par le Pakistan) avant de terminer au Pakistan.

Selon le Traité de l’Eau de l’Indus, signé en 1960 par le Pakistan et l’Inde, le premier a des droits exclusifs sur les affluents occidentaux (Indus, Jhelum et Chenab qui prennent tous deux source dans le Cachemire indien) et la seconde sur les affluents orientaux (Sutlej-Beas et Ravi). De plus, ce traité autorise l’Inde à exploiter le potentiel hydroélectrique des rivières Jhelum et Chenab, tant que cela ne réduit ni ne retarde l’approvisionnement en eau du Pakistan - ce qui est souvent subjectif et a fréquemment requis l'intervention d'instances internationales d'arbitration. En ce moment d'ailleurs, l’Inde a de gros projets de barrages, ce qui inquiète ses voisins. Par ailleurs, le Pakistan et l’Inde ont déjà beaucoup endommagé l’Indus pour permettre l’irrigation et l’hydroélectricité de la région.

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Update : Depuis mi-octobre, les lignes fixes sont rétablies et les lignes de téléphonie post-paids également.

lundi, 28 août 2017

Quand l'idolâtrie rend aveugle

Aujourd’hui, lundi 28 août, la plupart des écoles de Gurgaon sont fermées. Non pas pour cause de grande chaleur, ni de pluie torrentielle, ni d’extrême pollution, ni d’élection, ni même parce que c’est l’heure du bain annuel du dieu à tête d’éléphant. Non. C’est parce qu’un fou fanatique, auto-proclamé dieu, passe en procès pour viol. Et donc pourquoi fermer les écoles ?? Parce ce que ses fans protestent !! Il a été jugé coupable vendredi de deux viols – et les manifestations ont provoqué la mort de 30 à 40 personnes -  et on attend la peine aujourd’hui.

inde,gourous,maîtres,religion,controverses,scandales,viols,ram rahim,bapuji,amma,sai baba,sri sri ravi shankar,modiCe type de 50 ans, Ram Rahim, est à la tête d’une secte, Dera Sacha Sauda, basée en Haryana et présente surtout dans le Nord (Haryana, Punjab and Delhi) – elle se targue d’avoir 60 millions d’adeptes. On lui reproche son mauvais goût vestimentaire et bijouteux ; il est d’ailleurs surnommé le « gourou du bling ». Mais surtout, outre des dizaines de viols, l’assassinat d’un journaliste qui avait enquêté dessus en 2002, et d’avoir fait castrer 400 de ses conseillers. D’un autre côté, sa secte a des hôpitaux et des écoles, et s’occupe de soutenir ses fans en situation précaire. Ce qui explique peut-être que même ses groupies féminines continuent de le soutenir.

Ce pays est quand même un peu fou !!

Tu me diras, y en a bien qui idolâtrent Madona et qui seraient prêts à mourir pour elle, alors pourquoi ne pourrait-on pas vénérer un gros poilu ?

Quelques autres gourous vivants qui font fureur, en Inde mais aussi en-dehors :

inde,gourous,maîtres,religion,controverses,scandales,viols,ram rahim,bapuji,amma,sai baba,sri sri ravi shankar,modiBaba Ramdev – Le maître de yoga qui a lancé la marque Patanjali de produits de grande consommation soi-disant ayurvédique (se marketant avec succès comme de qualité à des prix abordables), un empire qui fait aujourd’hui un chiffre d’affaires de plus d’1.6 milliards de dollars (cf un article en francais).

inde,gourous,maîtres,religion,controverses,scandales,viols,ram rahim,bapuji,amma,sai baba,sri sri ravi shankar,modiAmma (‘mère’) ou Mata Amritanandamayi – La sainte qui guérit en faisant des câlins. Faites l’amour pas la guerre – enfin ses câlins n’ont rien de sexuel. Sa fortune s’élèverait à près de 3 milliards de dollars (cf un article en francais).

inde,gourous,maîtres,religion,controverses,scandales,viols,ram rahim,bapuji,amma,sai baba,sri sri ravi shankar,modiSri Sri Ravi Shankar (à ne pas confondre avec le musicien) – Connu pour sa philosophie d’Art of Living, il aurait 300 millions d’adeptes dans 151 pays. Sa fortune s’élèverait à près de 2 milliards de dollars.

inde,gourous,maîtres,religion,controverses,scandales,viols,ram rahim,bapuji,amma,sai baba,sri sri ravi shankar,modiBapuji ou Asaram Bapu – Lui j’en n’ai jamais entendu parler (comme de Ram) mais apparemment c’est l’un des gourous les plus riches en Inde, et surtout les plus controversés. Il est en taule depuis 2013 pour viol, toujours en attente de jugement.

inde,gourous,maîtres,religion,controverses,scandales,viols,ram rahim,bapuji,amma,sai baba,sri sri ravi shankar,modiSathya Sai Baba – Ce gourou aux soi-disant pouvoirs magiques est décédé en 2011. Il a également été accusé de viol à plusieurs reprises, sans qu’il ne soit jamais jugé.

A noter donc : L’Hindouisme est un terrain fertile pour l’adoration de gourous ; la plupart ont des soucis avec la sexualité – certainement dû au fait qu’ils prônent souvent le célibat, et sont en fait incapables de résister à leurs pulsions (mais ça fera l’objet d’un autre article) ; et le Premier Ministre, Modi, les brosse souvent dans le sens du poil.