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lundi, 06 septembre 2021

Le système scolaire indien – 6. Mon expérience de parent urbain riche en Inde pour l’inscription au CP

Quand Petit Samourai a été en âge d’aller à la maternelle, j’étais dégoûtée par la « rat race » que représente le système scolaire en Inde, avec un esprit compétitif poussé à l’extrême (tu étudies ou tu meurs), exacerbé dans un contexte où il y a plus de demande (d’enfants qui ont faim de s’en sortir) que d’offre (de bonnes écoles). Avec ma chance légendaire, je trouvais néanmoins une petite école Montessori absolument formidable. Tellement exceptionnelle qu’elle a réussi à rester ouverte (officieusement) après le premier confinement, soit depuis juin 2020. Le nombre d’enfants était restreint, la participation volontaire, les horaires réduits et la présence des parents obligatoire, mais quelle chance de voir son fils courir avec d’autres enfants de son âge (et au passage apprendre quelques multiplications) …

Pourtant il a bien fallu aller de l’avant avec le CP qui se profilait à l’horizon. Alors que les écoles indiennes ferment les candidatures en août, nous nous sommes réveillés en novembre, pour une rentrée début avril. Après un gros coup de chaud, nous avons de toute façon opté pour IB pour notre fils, surtout à cause de son profil bi-national. Là, il y avait de la place, et la rentrée était début août. Nous avons donc visité plusieurs écoles, comparé le ratio élèves/professeurs, les horaires, le coût, les infrastructures (avec ou sans équitation, c’est te dire…) et… rien ne nous a emballés. Les écoles semblaient s’être passé le mot pour promouvoir leur système d’aération et leurs activités indoor (« nous ne laissons pas les enfants sortir l’hiver à cause de la pollution ») ou la diversité des plats proposés à la cantine. Quand, par chance, il y avait un espace vert, seuls les collégiens y avaient accès. Autant te dire qu’après notre havre montessorien où l’activité principale consistait à jouer dehors, rien ne m’a fait envie. Surtout à 5000€ l’année. Je suis plutôt boutique hôtel que 5 étoiles, et les établissements visités ressemblaient plus à des complexes hôteliers qu’à des écoles. Il fallut en plus prendre en compte la réputation des écoles de fils à papa. Voici la comparaison des écoles en vue de Gurgaon. Je ne compte pas l'American School à 25 000$ l'année, ni le Lycée Français de Delhi pour le CP à 7500€ + 3000€ de frais d'enregistrement.

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Alors comme pour la voiture que nous avons achetée sans essayer, nous l’avons inscrit dans la seule école que nous n’avons pas visitée, et une ISCE en plus… Nous avions déposé une demande en février alors que les candidatures avaient été clôturées en août, mais au cas où il y aurait désistements. Il y en a eu et comme leur philosophie nous a plu, très orientée respect de l’enfant, avec des arbres dans lesquels on autorise les gosses à grimper et à lire etc., nous avons dit banco. Le bémol – il fallait bien qu’il y en ait un – c’est que c’est très indien, alors même si l’enseignement se veut en anglais, ça dérape bien vite à l’hindi. En ligne, ça complique les choses pour notre fils. Il s’y fera…

En attendant, les cours en ligne, je déteste. Les gosses qui parlent en même temps, ça me tue. Les horaires à respecter, les vacances à ne pas dépasser, les devoirs, ça m’oppresse. L’adaptation du système Montessori au système traditionnel est peut-être plus dur pour les parents que les enfants !

Fin

lundi, 30 août 2021

Le système scolaire en Inde – 5. La réputation du système scolaire en Inde et la loi de 2020

N’ayant pas moi-même étudié en Inde, je me réfère à ce que mes proches m’en disent.

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  1. Le système indien se concentre sur l’outil de mémoire – apprendre par cœur, recopier des livres etc. L’incitation à la réflexion est sommaire, voire inexistante. Il n’y a par exemple par de cours de philosophie (qu’elle soit occidentale ou orientale). J’ai lu que c’est les Anglais qui préféraient que les Indiens apprennent le latin et le grec plutôt que d’utiliser leur cerveau (source).
  1. Les professeurs ont la main lourde, en plus d’être peu ou pas formés à leur job et très régulièrement absents.
  1. Il existe une concurrence incroyable car les bonnes universités sont rares et les places très chères – on parle quand même de 740 000 écoles, 5 millions de professeurs et plus de 200 millions d’enfants entre 6 et 14 ans (les 2 tiers vivant en zone rurale). Pour entrer dans un IIT par exemple (Indian Institutes of Technology qui ont très bonne réputation), il y a 12 000 sièges par an – pour à peu près 100 fois plus d’élèves qui y prétendent. C’est probablement l’un des examens les plus durs au monde. Les étudiants indiens reçoivent une pression incroyable dès leur plus jeune âge. D'ailleurs, en période d'exams, le Premier Ministre fait passer des messages à la radio exhortant étudiants et parents à se décontracter - les médias se régalent des histoires de suicide des jeunes (source).
  1. Le système est franchement élitiste, de par son design colonial, de par la structure sociale castéiste indienne, et de par l’effet conjugué de la masse et de la pauvreté – les bons professeurs prennent d’autres jobs, mieux payés, et les places dans les bonnes écoles qui se les offrent sont chères. La plupart des établissements les mieux côtés sont des pensionnats (parfois pas mixtes), calqués sur le système britannique. Ils ont le mérite d’être en général situés dans une région où l’air est respirable. Les enfants s’y retrouvent avec ceux de leur classe sociale et y travaillent leur réseau.
  1. C’est d’ailleurs pour cela que les parents s’endettent parfois dès la maternelle pour mettre leurs enfants dans les « meilleures » écoles. Les petits n’ont pas 4 ans qu’au moment de l’inscription, les parents demandent à l’administration les taux d’admission dans les universités étrangères. Ils regardent également les réseaux d’anciens élèves et les salaires à attendre à la sortie – on faisait la même chose en France quand on allait en école de commerce, mais on regardait ça vers 18 ans, au moment de la prépa. En plus de payer des sommes faramineuses pour les écoles, les parents payent des tuteurs (tuitions ou cours particuliers). Ce type de coaching représenterait 13% des dépenses scolaires (source), et les livres 20%. (D’ailleurs, 70% des livres publiés en Inde sont des manuels scolaires contre 14% en France (source).) Mon fils ne peut quasiment pas jouer avec son voisin de 8 ans l’après-midi parce qu’il a cours (en ligne) de coding, mandarin et robotique. La mère m’a expliqué qu’il fallait commencer à préparer le CV dès maintenant…
  1. Dans ce contexte, tu penses bien que l’épanouissement personnel de l’enfant… et bien ce sera pour plus tard, quand ils seront tous en haut de la pyramide de Maslow. Les écoles IB (International Board) et les maternelles Montessori sont quand même une amorce de changement de mentalité. Attention cependant, en Inde, tellement d’écoles se mettent l’étiquette « international » et « montessori » sans en appliquer les principes (source).

En 2020, une nouvelle loi sur l’éducation a été passée. Ça montre que le Gouvernement s’intéresse au sujet, la loi précédente datant de 1986 (source) et qu’il souhaite donner plus d’importance à l’enseignement en langue locale et au sanscrit. Le système pédagogique va être coupés en blocs et il y aura plus de flexibilité pour choisir ses matières. Rien de révolutionnaire ni rien pour régler les vrais problèmes de l’éducation (salaires et formations des professeurs, manque d’infrastructures etc.).

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À suivre…

lundi, 23 août 2021

Le système scolaire indien – 4. Les baccalauréats

En Inde, l’école va du CP au bac – du Grade 1 au Grade 12 (j’avoue c’est plus simple que nos CE1, CM2 etc.) – mais les écoles commencent en fait dès la grande section de maternelle (Kindergarten ou KG), voire la classe d’avant (nursery). Avant, c’est la playschool. Jusque-là, ça va.

Ensuite, il y a les différents boards (ou baccalauréats) : indien (CBSE Central Board of Secondary Education), aussi indien (ISCE Indian School Certificate Examinations), international (IB International Board) et anglais (Cambridge ou IGCSE International General Certificate of Secondary Education). Voici les principales différences entre les boards (source) :

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Les écoles les plus populaires et les meilleures sont CBSE ; elles sont souvent prises d’assaut et il faut s’y prendre bien à l’avance. Anecdotiques mais information qui peut peser dans la balance de couples bi-nationaux, les grandes vacances sont de mi-mai à début juillet pour les boards indiens et de mi-juin à début août pour IB.

IB se développe rapidement, notamment parce que les méthodes sont plus modernes, et se détachent du fameux crédo (« par cœur, par cœur, par cœur ») du système indien. En revanche, elles coûtent souvent un rein – parce que l’affiliation en Suisse coûte cher et puis ça se veut international, donc élitiste, donc cher. Du coup, en tout cas à Gurgaon, « ville nouvelle » où les écoles poussent comme des champignons, on trouve de la place dans les écoles IB.

En réalité, il paraît que c’est surtout à partir du collège que la board importe, que les méthodes d’enseignement changent beaucoup. Mais les parents préfèrent mettre leurs enfants dans un même établissement pour toute leur scolarité (d’ailleurs les frais d’inscription ne sont pas négligeables, histoire de te faire passer l’envie de le changer d’établissement tous les 2 ans). Alors que l’Indien est traditionnellement très ancré dans sa région, la certitude d’habiter toujours au même endroit s’amenuise de plus en plus, au fur et à mesure que la mobilité professionnelle augmente.

Malgré les résultats scolaires impressionnants des enfants de notre école Montessori, de nombreux parents retiraient leurs enfants dès 5 ans, voire 4 ans, pour les mettre dans des « vraies » écoles. Ils subissent la pression des grands-parents pour qui une école de 36 écoliers n’est pas digne d’intérêt – même s’ils savent lire des romans quand leurs pairs en sont aux mots de 3 lettres. Et puis les places sont chères dans les « vraies » écoles. Dans des villes comme Delhi, où peu de nouvelles écoles ouvrent, les places peuvent être très très chères. Il faut voir le film Hindi Medium à ce sujet (voir bande annonce ci-dessous). Un père qui s’est sorti de la mouise tout seul veut mettre leur enfant dans l’école la plus prestigieuse. Il rate son entretien et décide d’aller vivre dans un bidonville pour que leur gosse bénéficie des quotas (25% des sièges) réservés aux plus démunis.

Dans les petites sections, les enfants (enfin, leurs parents) doivent remplir tout un dossier, avec lettres de motivation etc. Il y a des entretiens (un pour l’élève et un pour ceux qui l’élèvent) et ensuite un tirage au sort (mais oui). Un ami de mon fils s’est fait recaler parce que son père a voulu faire le malin en répondant « aucun » à la question « quel est le dernier livre que vous avez lu ? Au passage, nombreux sont ceux qui tentent de soudoyer l’école. Je connais quelqu’un qui avait offert plus de 200 000€ pour ses 2 enfants et qui s’est quand même fait recaler. Naïve, j’ai demandé ce que cette école offrait de si extraordinaire en termes d’éducation. Il m’a répondu que c’était pour le réseau qu’il payait, pas les cours. Quand j’ai appris que pour certaines écoles il fallait s’y prendre avant la naissance, j’ai flippé. C’est surtout vrai pour les écoles CBSE.

À suivre…