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jeudi, 12 février 2015

Bébés made-in-India – 6. La médicalisation de la naissance

inde,grossesse,bébé,nourrisson,accoucher,accoucher dans l’eau,césarienne,fertilité,contraception,stérilisation,gynécologue,épidurale,isolement,coutumes,sexe,accouchement,sage-femme,couche,massage,emmailloter,langer,allaitement70% des bébés indiens naissent à la maison, avec l’aide d’une sage-femme (dai). Paradoxalement, les hôpitaux ‘modernes’ (on trouve à manger et à boire en terme d’infrastructure avec certaines options au moins au niveau de l’Europe si ce n’est mieux) ne reconnaissent pas cette profession ! Résultat, ma sage-femme (britannique) se voit souvent interdire l’accès à la salle d’accouchement, ou refuser de faire équipe avec le gynéco (qui dans tous les cas reste le boss et ne la consulte pas pendant la naissance).

 

Les Indiens ont tendance à faire confiance aveuglément aux médecins. C’est ainsi que la pratique de l’épisiotomie (petit découpage vaginal des maisons préventif), en forte régression en Occident (5), reste très largement répandue. D’ailleurs presqu’aucune mère ne sait que c’est optionnel ; j’irai même plus loin en disant que presqu’aucune nouvelle mère ne sait que ça va lui arriver ! Elles ne sont pas à blâmer : même ma gynéco n’a jamais mentionné l’épisiotomie et ce n’est que grâce à ma sage-femme que j’ai découvert ce que c’était…

 

Par ailleurs, les Indiennes sont très peu au fait de l’anesthésie pendant l’accouchement. Je n’ai d’ailleurs pas trouvé de statistiques, à part un petit sondage qui confirme mon opinion. La plupart des Indiennes auxquelles j’évoque la péridurale n’en ont jamais entendu parler et n’arrivent pas à concevoir qu’on puisse accoucher sans sentir les contractions – interrogation valable, à laquelle je n’ai eu la réponse qu’après mon accouchement !

 

C’est ainsi qu’aujourd’hui près de la moitié des accouchements sont des actes de chirurgie (contre 21% en France, 25% en Angleterre)… Et à la campagne comme à la ville.

 

Plus marquant encore, c’est l’augmentation des césariennes planifiées (vs les césariennes médicalement nécessaires). Les responsables ? Un peu tout le monde. Pour les médecins c’est plus rentable (ils facturent plus les actes chirurgicaux), plus facile à caler dans l’agenda et (certains le plébiscitent) moins risqué pour la patiente. Pour les femmes c’est souvent remboursé par des assurances privées, perçu comme moins douloureux, plus facile à caler dans l’agenda (notamment lorsqu’il y a des impératifs astraux, ça permet que le bébé naisse avec une bonne configuration de planètes (je blague pas !)) et (certaines le croient) moins risqué. M’est d’ailleurs avis que ma belle-mère imaginait que le sort me réservait une césarienne lorsque j’allai consulter ma gynéco le jour du terme – ca faisait déjà plus d’une semaine qu’elle était là à Mumbai à trépigner, il était peut-être temps de passer aux choses sérieuses !

 

(5) En France, « le taux d’épisiotomie a baissé de 71 à 45 % entre 1998 et 2010 ».

 

Sources : http://www.midwiferytoday.com/articles/india.asp ; http://www.liberation.fr/vous/2011/10/18/70-d-accouchements-avec-peridurale_768628 ; http://www.who.int/healthsystems/topics/financing/healthreport/30C-sectioncosts.pdf ; http://www.huffingtonpost.com/2014/04/16/c-section-rates_n_5161162.html?ir=India ; http://qz.com/326402/cesarean-births-in-india-are-skyrocketing-and-there-is-reason-to-be-very-worried/; http://www.cesarine.org/avant/etat_des_lieux.php ; http://www.hscic.gov.uk/catalogue/PUB12744/nhs-mate-eng-2012-13-summ-repo-rep.pdf; http://www.liberation.fr/vous/2011/10/18/70-d-accouchements-avec-peridurale_768628

 

(A suivre…)

mardi, 10 février 2015

Bébés made-in-India – 5. Versus les moeurs françaises

inde,grossesse,bébé,nourrisson,accoucher,accoucher dans l’eau,césarienne,fertilité,contraception,stérilisation,gynécologue,épidurale,isolement,coutumes,sexe,accouchement,sage-femme,couche,massage,emmailloter,langer,allaitementComme y a pas de mal à se faire dorloter, ces coutumes du retour au bercail maternel, de l’isolation et de l’alitement persistent à travers les âges et les classes sociales. Plusieurs fois je demandai à des collègues nouvellement élevés au rang de père s’ils n’étaient pas trop fatigués. Et m’entendais répondre « ah nan tu sais ma femme et le bébé sont dans ma belle-famille, ils ne rentreront qu’au bout de trois mois ! ».

 

On est bien loin de l’ ‘isolement’ de la nouvelle mère française (quoique apparemment (d’après Tracy Hogg) cette période des 40 jours existe aussi en Angleterre)) qui va devoir vite tout faire toute seule : la bouffe, le ménage etc., en plus de s’occuper du nouveau-né. Voilà ce que j’essayais d’expliquer à mon entourage indien : moi, femme d’affaires indépendante et fille de femme d’affaires indépendante, j’étais génétiquement programmée (sauf complication médicale) pour me débrouiller vite toute seule. Et puis avec les ‘services’ que l’on trouve en Inde, i.e. employés de maison, livraisons de courses et de repas, c’est quand même plus facilement gérable qu’en Occident.

 

Quant à l’accouchement, l'homme indien n'est traditionnellement pas convié à y assister - comme ce fut le cas jusqu'aux années 50 en Occident où le débat n'est d'ailleurs pas encore clos quant à la nécessité et bénéfices de la présence du père (mais au moins le choix est libre)... Donc on se retrouve avec comme soutien la mère ou la belle-mère en salle de travail.

Et puis après il faut aussi quelqu'un pour aider vu qu'il existe des maternités qui ne servent pas à manger. Ainsi, la mienne (de belle-mère) proposa gentiment de rester à l’hôpital avec nous la première nuit (4)… Pour elle c’était son rôle de se lever la nuit quand le bébé pleure ; pas le mien, ni celui de son fils ou des infirmières. Pour me le passer afin que je le nourrisse. Enfin c’était le rôle de ma mère, présente mais visiblement pas décidée à se dévouer ! Ma mère dut en effet paraître bien inconsidérée en entrainant son homologue dans des virées shopping quotidiennes au lieu de squatter notre chambre d’hôpital ! En fait elle faisait son boulot de mère de Samouraï, à savoir s’assurer qu’on ait un peu d’intimité tous les trois…(Et ‘intimité’ c’est un mot qu'existe pas dans le dico (indien), alors que c’était pourtant le maître mot de notre plan de naissance !!) 

 

Quant à notre hôpital, nous avions choisi le nec plus ultra : non seulement ils servaient à manger mais en plus nous avions une nutritioniste et une experte en allaitement pour nous aider à faire la transition ! En plus, en imposant des horaires de visite strictes, ils s'affichaient 'pro-intimité' et innovateur (normalement, une fois le bébé mis au monde, toute la famille se déplace. T'imagine même pas le chaos !). Et il y avait pléthore d'infirmières pour nous aider et s'assurer que notre intimité ne soit pas trop complète !!

 

(4) Fait appréciable en Inde, chaque patient a le droit d’avoir un proche qui reste la nuit – le personnel hospitalier te regarde même d’un drôle d’air si, pauvre Rémi-sans-famille (c’est-à-dire l’expatrié moyen), tu n’as personne à tes côtés – et je suis sûre que ce soutien aide à la guérison.

 

(A suivre…)

dimanche, 08 février 2015

Bébés made-in-India – 4. Le prénom

Babies - 4.jpgOn me demanda fréquemment, jusqu’au deux mois du bébé si on avait déjà choisi le prénom ! En effet, en Inde, le bébé n’est prénommé qu’au terme de la période de sûreté, en général 40 jours. Ça laisse le temps à l’astrologue de trouver le nom, ou au moins la première lettre. Pendant ce temps, bébé s’appellera bébé, et les mauvais esprits n’auront qu’à bien se tenir !

 

Et si tout se passe bien, la famille organise au terme des 40 jours la ‘cérémonie du nom’ au cours de laquelle le bébé est présenté au monde et des sucreries sont distribuées à toutes les connaissances (surtout si c’est un garçon). C’est en général à cette occasion que les hijras (cf mes notes sur le sujet) viennent réclamer leur dû, gage que le mauvais œil se tiendra éloigné. J’étais d’ailleurs pas trop contente quand le gardien laissa ces dernières, mieux renseignées que la municipalité, se pointer chez nous.

 

Certaines coutumes indiennes poussent même le vice jusqu’à prôner l’alitement complet de la mère (par exemple pendant les 10 premiers jours au Kerala). Période pendant laquelle elle se fait bichonner et n’a rien d’autre à faire qu’apprendre à connaître son bébé et de se remettre de cette épreuve indéniablement physique. L’idée semble bonne mais des hyperactives risquent de trouver le temps long…