vendredi, 27 mars 2020
Personne pour maid-er ! - Le Covid vu par une Française en Inde - 27.03
- Nombre de cas en France : 32 964 (1 995 morts)
- Jour de confinement : 10
- Nombre de cas en Inde : 724 (17 morts)
- Jour de confinement à Gurgaon : 5 / National : 3
Elles sont quand même forts de chai les Indiennes.
Quand notre résidence a annoncé que les maids qui ne vivaient pas chez leurs employeurs n’étaient plus autorisées à venir travailler, ça a failli tourner au pugilat whatsappien. « Mais pourquoi nous on n’y pas droit et la résidence truc et la résidence muche autorisent, hein ?? Pourquoi pas moi ?? Mais comment je vais faire ? » « Moi je veux bien faire la cuisine et nettoyer le sol, mais le jardin ça va pas ?? » Et v’là que ça s’insultait. C’est que ça ne sait même pas pousser un caca d’animal dans le terreau des plantes !
On aurait pu croire qu’avec l’annonce du Premier Ministre, les choses étaient plus claires. C’est sans compter que les Indiens d’une part sont les champions mondiaux du contournement des règles et d’autre part leur confort passe d’abord. D’ailleurs, certains voisins ont été repérés hier avec des femmes de ménage planquées dans leur voiture, à quatre pattes. J’ai d’ailleurs écrit un article précédemment sur l’indispensabilité et la dispensabilité des maids en Inde. Si j’étais une maid en Inde et si j’avais accès aux conversations des employeurs, je saurais en profiter ! Ce qui sera le cas quand l’offre (le nombre de travailleurs domestiques) se rapprochera de la demande. Comme c’est déjà le cas au Kerala par exemple, où ils sont obligés de faire venir des gens du West Bengal et donc d’apprendre au moins l’hindi pour communiquer avec eux/elles.
Et puis alors, hier soir, les autorités d’Haryana ont publié la liste des exceptions, des métiers autorisés. Et figure-toi que les aides domestiques en faisaient partie ! Au lieu de questionner le bien-fondé d’une telle logique, mes voisines ont réclamé leurs maids à cœur et à cris. Pas de bol, les autorités se sont réveillées. Ça devait être l’un des rédacteurs de l’annonce, harcelé par sa femme pour qu’on autorise sa femme de ménage à venir bosser, qui avait fait la « bourde ». Ou bien il pensait que ça prendrait trop de place d’écrire « seulement pour les personnes très âgées et seules, et celles handicapées ». Les autres n’ont plus qu’à se mettre à la maid-itation !
Au milieu de tout ce bins, le responsable de la maternelle de Samourai Junior a contactés les parents ce matin et a, sans le savoir, proposé la solution idéale à ce problème d’absence d’aide à la maison : les gosses ! Les vieux pourraient aussi s’y mettre, à éplucher les oignions par exemple. Peut-être que dans quelques semaines, la société indienne sera transformée…
Ceci-dit, il est bon lui avec son ZERO temps d’écran ! Même si 90% des mères de notre école sont au foyer et ont théoriquement plus de temps que les autres (qui doivent aussi faire à manger et le ménage, et en plus travailler), il faut avoir les reins solides. Ceci étant dit, j’ai autorisé Samourai Junior à une heure ou deux d’iPad lundi et mardi – j’avais des trucs à faire, des réunions tout ça, et il ne voulait pas me lâcher (il devait être en phase d’adaptation et gérer quelques angoisses). Et bien mercredi, il m’a demandé de ne le laisser regarder que le « movie day » (dimanche). Et depuis il ne demande pas son iPad…À l'heure où j'écris, il fait la vaisselle.
J’attends encore les messages qui oseraient suggérer que les mecs indiens mettent la main à la pâte...
Pendant ce temps, à Londres, ma pote se fait livrer moquette et hotte et invite un ami à dîner pour l’aider à la poser. Et puis elle sort faire son jogging tous les jours. Ici, plus personne ne livre et on n’a pas le droit de sortir sauf pour faire ses courses. Donc on reste chez soi. Sauf ceux (peut-être 470 millions) qui ne peuvent pas vivre dans les bidonvilles et cherchent à rentrer chez eux, à pied - voir cet article
Et l'Inde risque d'avoir bientôt un autre problème bien local si personne ne sort : les animaux des rues :
Pour en revenir à nos moutons (de poussière) et pour finir sur une note un plus positive, voici le genre de blagues de femmes au foyer qui circulent en Inde en ce moment :
Corona, coronavirus, virus, covid, covid-19, Inde
08:00 Publié dans Covid19, Expatriation (en Inde et ailleurs), Histoires de Samouraï, IncredIble India | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : inde, corona, coronavirus, virus, covid, épidémie, maid | Imprimer | Facebook |
jeudi, 26 mars 2020
Je vais bien, tout va bien, je suis gai, tout est gai ! Ou pas… - Le Covid vu par une Française en Inde - 26.03
- Nombre de cas en France : 29 155 (1 696 morts)
- Jour de confinement : 9
- Nombre de cas en Inde : 649 - dont 43 étrangers apparemment (13 morts)
- Jour de confinement à Gurgaon : 4 / National : 2
Ma nounou parle en coréen à Samourai Junior, ça le fait tourner en bourrique – elle est Népalaise, rien à voir. Mais elle est fan de sitcoms coréennes.
Mon Samourai de 5 ans fait des sophismes : “I hate the world ! ” Ah bon, mais pourquoi ?? “Corona virus is in the whole world [and I hate corona virus] so I hate the world!” Quant à moi je vais devenir chèvre s’il m’appelle une fois de plus… Ou bien je vais donner mon boulot à la nounou et m’occuper de lui ;)
À part ça, de nouvelles difficultés techniques apparaissent tous les jours. Internet a 2 de tension. Amazon ne livre toujours pas. Les employés du gaz ne sont plus autorisés à entrer dans la résidence et nous découvrons les joies de devoir transporter une bombonne sur 200 mètres. Certains voisins se disent près à aider mais les chefs de la résidence s’insurgent au nom de la distanciation sociale.
À Mumbai, certains magasins de quartier s'organisent
Des propriétaires qui ont peur de se faire infecter virent des soignants de leurs auberges de jeunesse. Et parfois ces derniers se font taper dessus par les flics quand ils essayent d’aller bosser – on a dit on reste à la maison bon sang ! Les flics commencent d’ailleurs à débloquer et donner du bambou sur tout ce qui bouge. En même temps, ils doivent être sur les dents, dehors à bosser alors que le Premier Ministre a dit que quiconque sortait aller mourir et tuer sa famille. Dans le Punjab, certains policiers auraient acheté tout le stock de légumes d’un vieux vendeur qui refusait de rentrer chez lui avec ses produits.
Certains policiers ont des punitions particulières - une punition typiquement indienne pour les enfants: ils doivent se tenir le lobe des oreilles et faire des accroupissements. Ça fait plus mal à l'ego qu'aux abdos!
Nos voisins autrichiens se font la malle – leur Gouvernement a donné à ses nationaux résidant en Inde leur « dernière chance » d’être rapatriés et leur entreprise a décidé de la saisir, un peu contre leur gré. Ça me rend triste de les voir partir ; ils sont un petit peu des parents de substitution – même si j’ai vraiment du mal à les comprendre avec leur accent à couper au couteau. (L’ambassade de France est en train d’organiser le rapatriement des quelques 2 000 Français en Inde qui ne sont pas résidents ; ils seraient 100 000 dans le monde. Pas évident quand les transports sont annulés, déjà pour organiser un avion international depuis une grande ville et ensuite pour acheminer les gens depuis de plus petites villes. Et certains se payent encore le luxe de refuser de monter parce qu’ils refusent de payer 450€ de billet. Va savoir leur plan de survie à ceux-là, quand tu sais que les hôtels sont fermés, sauf ceux qui sont accrédités pour de la quarantaine, et que les Indiens ont comme qui dirait pas envie d’héberger ces Occidentaux qui ont amené la maladie avec eux. D’ailleurs, il existe une initiative pour aider les Français à l’étranger : SOS un toit pour les Français. www.sosuntoit.fr).
Notre voisine espagnole déprime, elle garde le rangement des placards pour plus tard mais du coup elle s’ennuie déjà. Pendant le petit déjeuner, j’ai vu la tête de son mari, à moitié bouffée par un masque, passer par-dessus la barrière pour regarder dans le jardin. Il cherchait ses gosses (qui ne sont pas censés sortir) et il a failli me faire avoir une crise cardiaque.
Ma voisine de Turin panique. Son mari est au Texas depuis janvier. Elle doit partir dimanche en Italie pour ensuite le rejoindre, avec leurs deux fils ados. Mais c’est pas gagné. En attendant, elle ne perd pas le nord, et me propose de me vendre son surplus de vin italien !Si elle reste toute seule un mois confinée, y aura ptêt plus beaucoup de stock à la fin ;) M'enfin, les wine shops semblent considérés d'utilité publique - à juste titre m'est avis! - et ils sont encore ouverts, bien achalandés et pas pris d'assaut, à ma plus grande surprise.
Une autre voisine a invité mon fils à jouer avec sa fille, ils sont super potes. Apparemment, le message du « chacun chez soi » a du mal à imprimer. C'est peut-être pour ça que la mise en place du confinement est un peu musclée et sans concession. Si chacun y va de son exception, avec 1,3 milliards de gens, ça va être ingérable.
Ce soir, je vais boire un coup, de balcon à terrasse, avec notre autre voisine à qui j'ai parlé pour la première fois il y a deux jours. C’est incroyable mais je n’ai jamais autant parlé avec mon entourage que depuis que nous sommes confinés.
Le temps est tristoune. Alors que l’été devrait être bien installé, il vente, pleuviote, bref du jamais vu. Du coup, les températures sont clémentes, ne nous plaignons pas !
La nature reprend ses droits, les feuilles ne sont plus ramassées.
Corona, coronavirus, virus, covid, covid-19, Inde
11:00 Publié dans Covid19, Expatriation (en Inde et ailleurs), Histoires de Samouraï, IncredIble India | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : inde, coronavirus, corona, covid, épidémie | Imprimer | Facebook |
mercredi, 25 mars 2020
C’est parti mon kiki - Le Covid vu par une Française en Inde - 25.03
- Nombre de cas en France : 25 233 (1 331 morts)
- Jour de confinement : 8
- Nombre de cas en Inde : 562 (9 morts)
- Jour de confinement à Gurgaon : 3 / National :1
Ça y est, Modi ne blague pas. Confinés. Tous. Et ça va barder pour ceux qui ne s’y plient. Pour 21 jours.
Pour ceux qui sont long à la comprenette, il nous a montré un poster Co pour Koi (personne), Ro pour Road (rue), Na pour Nahi (non). Co-ro-na = Personne-dans-la-rue
Les chantiers sont arrêtés – les policiers empêchent les ouvriers d’accéder aux sites. D’ailleurs, ils vont aussi dans les quartiers où vivent les employés de maison pour les empêcher de sortir de chez eux. Du coup, certains errent, cherchant à rentrer chez eux sans moyen de transport :
Même si l'activité des entreprises de première nécessité est autorisée, les travailleurs n'arrivent pas à aller sur leur lieu de travail. Il y a un système de pass, qui nécessite entre autres d'avoir une pièce d'identité et des photos d’identité, ce qui n'est pas le cas de bon nombre d'ouvriers. Et d’un autre côté, les familles ne laissent pas leurs hommes aller travailler, effrayés par le discours du Premier Ministre qui a utilisé des mots comme « restez chez vous ou vous allez mourir et tuer votre famille ».
Mon Indien préféré a voulu aller en voiture au mandi (le marché de gros) ce matin, et la police ne l’a pas laissé passer. Nos petits magasins de quartier sont fermés, les entreprises qui livrent de la nourriture n’ont pas assez de personnel pour assurer les livraisons. Les vendeurs de fruits et légumes n’opèrent plus. Le supermarché local est ouvert et bien achalandé. Comme en France, une queue à l’extérieur s’impose, avec distanciation sociale. D’ailleurs j’ai proposé de faire les courses pour une voisine nouvellement débarquée de Dubai qui n’a pas de voiture (et Uber ne fonctionne plus) et elle s’est lâchée, glaces et tout ça ! Le Gouvernement recommande de se faire livrer les courses – un luxe auquel nous sommes habitués ici – mais ça risque de prendre un peu de temps à se mettre en place. Surtout si les livreurs se prennent des coups de bambou quand ils veulent aller bosser :
La bonne nouvelle, c’est que les voisines ont cessé de pleurer à cause de leur femme de ménage que la copropriété ne laissait pas passer. Et surtout que certaines ONG ont été autorisées à organiser des distributions de nourriture pour certains.
La moins bonne nouvelle c’est que les singes sont arrivés dans la copropriété – ils vont commencer à avoir faim puisque les temples sont fermés – pourvu que ça ne dégénère pas. Et qu’internet s’est considérablement ralenti cet après-midi.
Pour conclure, globalement, cela ressemble à un miracle. J’aurais pas cru qu’on arriverait à boucler les Indiens chez eux, ne serait-ce que parce que je ne vois pas comment ceux qui vivent à 5 dans 15 mètres carrés peuvent survivre. Le confinement est mis en place de manière musclée. Espérons que toutes ces mesures ont été prises à temps. Apparemment, elles vont encore se durcir.
Corona, coronavirus, virus, covid, covid-19, Inde
08:04 Publié dans Covid19, Expatriation (en Inde et ailleurs), Histoires de Samouraï, IncredIble India | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : inde, corona, coronavirus, covid, épidémie, lockdown, confinement | Imprimer | Facebook |