lundi, 02 mars 2015
Bébé Samouraï made-in-India – 7. Après la piscine
On finit donc par me sortir de l’eau pour de bon. Et là, je nageais (je file la métaphore de l’eau, c’est beau) alors en plein surréalisme.
Imagine-toi. Depuis toujours, je suis la première à dire, comme plus de 80% des Françaises (2), que si jamais j’accouche, c’est la péridurale direct. Avec mon argument massue : quand tu vas chez le dentiste, tu fais bien une anesthésie non ? et ben là c’est pareil.
Et voilà que j’étais en train de souffrir le martyre et que je ne disais rien. Rien de rien. Pas un mot. Je souffrais EN SILENCE. Juste une voix dans ma tête qui hurlait « mais filez-moi un-euh putain de péridural-euh »). Tu parles d’un Samouraï !
Et là baboom, une anesthésiste se matérialisa, presque désolée d’être là : tout le monde semblait archi-persuadé que je voulais une naissance naturelle (sans doute parce que j’avais opté pour la piscine) et que par conséquent j’étais contre les antidouleurs. Je dus donc écouter le sermon de mon docteur qui m’expliqua qu’il n’y avait pas de honte à accepter de réduire la souffrance, que j’avais déjà beaucoup donné et qu’elle-même avait donné naissance à des jumeaux par césarienne. En plein surréalisme je nageais, je te dis !
Je refusai de sniffer du gaz et mais acceptai une rachianesthésie (pas de temps pour la péridurale). Soulagement immédiat !
Bref, je finis par accoucher… Allongée sur une table, les jambes écartées, avec mon Indien préféré, trois gynécos, deux pédiatres, une anesthésiste, une sage-femme, et six infirmières dans la pièce. Et je m’en foutais royal !! Pire, je me marrais en repensant à l’accouchement ‘intime’ que j’avais prévu !! Au temps pour moi !
Et voilà Bébé Samourai était là ! Sur ma poitrine ! A me pisser dessus ! C’est là d’ailleurs qu’on se rendit compte que c’était un garçon : les médecins avaient oublié de vérifier…
En Inde, la détermination du sexe du fœtus est interdite, les Indiens ayant abusé de cette technologie pour avorter de filles – qui coûtent cher, avec la dot. L’Inde a d’ailleurs un déficit de filles et dans certains Etats ça pose de sacrés problèmes. (Cf mes notes sur le sujet)
Et le mot de la fin : Bébé Samourai déteste les bains, ça n’étonnera personne… ;-)
(2) Les Françaises sont apparemment plus douillettes que les Britanniques vu que seulement 30% de ces dernières optent pour une anesthésie (Sources : http://www.liberation.fr/vous/2011/10/18/70-d-accouchements-avec-peridurale_768628 ; http://www.babycentre.co.uk/a542571/epidural)
(Fin)
08:00 Publié dans Expatriation (en Inde et ailleurs), Histoires de Samouraï, Petit Samourai | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : inde, grossesse, bébé, nourrisson, accoucher, accoucher dans l’eau, césarienne, fertilité, contraception, stérilisation, gynécologue, épidurale, isolement, coutumes, sexe, accouchement, sage-femme, couche, massage, emmailloter, langer, allaitement | Imprimer | Facebook |
samedi, 28 février 2015
Bébé Samouraï made-in-India – 6. Dans la piscine
A 6h nous nous mîmes en branle pour la salle d’accouchement pour assister au remplissage – il paraît que le bruit qui coule a lui-même un effet apaisant pour le corps et dilatant pour le col de l’utérus. Et tout d’un coup j’étais très loin de l’idée que je me faisais de la naissance dans l’eau. Oui, curieusement, malgré cette vidéo affreuse, j’avais encore des images romanesques de la chose.
D’abord celle de la naïade qui s’ébat dans sa source d’eau chaude, ses longs cheveux couvrant sa poitrine dénudée (pudique, la naïade), les oiseaux pépiant joyeusement dans les arbres alentour. Et plouf, un petit cri, et son bébé nageur est là, faisant des clapotis à ses côtés. Un accouchement naturel que je me disais, retour aux sources (d’eau chaude). Quand j’y repense, j’avais occulté que la plupart des accouchements se passent la nuit – tout de suite moins romantique la sortie dans la jungle en pleine nuit – et que je devrais sans doute remonter à la préhistoire (et encore) pour me trouver une ancêtre qui ait tenté l’expérience, donc pas si « nature » comme accouchement.
Autre image que j’avais, plus ‘moderne’ celle-là, était celle d’une baignoire de grand hôtel, version jacuzzi, avec sels de bain, bougies parfumées, musique d’ambiance et verre de vin blanc. Limite j’avais hâte d’aller accoucher !!
Mais là, tandis que tout le monde s’affairait et que l’horreur de la situation me frappait en pleine face – j’allais devoir entrer dans cette piscine et souffrir – je n’osai pas crier au malentendu (« STOOOOP !! Arrêtez tout !! J’avais pas tout compris !! Je vais sur la table, je veux la péridurale ! »). Non, au lieu de ça, j’ôtai l’horrible robe de chambre de l’hôpital et m’apprêtai à entrer dans la piscine gonflable. A ce moment-là, la sage-femme proposa d’aller chercher mon tee-shirt. J’avais déjà tellement mal que je m’en foutais d’accoucher en soutif, tant pis, c’était trop d’effort de me changer. Elle offrit également de brancher mon MP3 mais soudain j’étais incapable d’entendre le moindre son (c’était bien la peine d’avoir téléchargé des musiques de relaxation exprès !).
Une fois dans l’eau, la gynéco me demanda si j’avais moins mal. Visiblement elle attendait une réponse positive et ne voulant pas la décevoir, j’acquiesçai. « Et oui c’est toujours comme ça ! », elle était contente. En fait j’étais tellement pétrie de douleur que je ne pus que me ratatiner, assise dans un coin, espérant que ça passerait si je ne bougeais pas un muscle. Au bout d’une heure, pour faire plaisir à la sage-femme, je changeais de position. Et passais l’heure suivante ratatinée dans un autre coin, mais accroupie.
Je restais ainsi 3 heures dans la flotte. Petites parenthèses quand on me sortait de l’eau pour me faire pisser dans des toilettes portables (malgré les encouragements de l’équipe médicale, je ne pus me résoudre à pisser dans la piscine), et autres joyeuseries. Finalement ma gynéco capitula : il n’y avait rien à faire, mon utérus refusait d’aller plus vite que la musique et l’eau chaude n’accélérait en rien sa dilatation.
(A suivre…)
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jeudi, 26 février 2015
Bébé Samouraï made-in-India – 5. Le débarquement à l’hôpital
Un soir, cinq jours après le terme, à minuit tout pile, je secouai mon Indien préféré qui dormait : les contractions semblaient avoir commencé ! Deux heures plus tard, il faisait déguster ses jus faits maison à la sage-femme dans l’antre de notre chambre pendant que je me tordais de douleur…
A 2h45, au son d’une fanfare disco dans la rue (on cherchera pas à comprendre, c’est Mumbai), nous partîmes enfin pour l’hôpital où nous fûmes reçus par une infirmière perspicace « vous êtes enceinte ? Et vous venez pour quoi ?? ».
A 3h00, une employée de l’hôpital m’enchaînait à une chaise roulante – je pensai bien protester, pour la forme, et pour l’absurdité de la chose, et parce que j’en avais le droit (après tout j’étais enceinte et sur le point d’accoucher, on m’aurait bien passé un petit caprice), et y aller à pied, ou en tout cas pas sanglée. L’Inde, terre de contrastes et contradictions, est un pays où tout se vérifie, et son contraire aussi… Ainsi, si la plupart des Indiens vivent dans le plus grand mépris des règles (de conduite, de file d’attente etc.), certains dont la profession se résume à quelques tâches simples et répétitives préfèreraient se faire couper un bras que de déroger à leurs instructions. Je renonçai donc à discuter et partie dans les étages dûment harnachée sur ma chaise.
A 3h05, nous étions dans la chambre.
A 3h07, j’avais enlevé la pile de l’horloge dont le tic-tac m’irritait.
A 3h10, j’observais, médusée, l’interne de service mesurer la durée de mes contractions les yeux rivés à l’horloge. Il lui fallut bien une minute pour réaliser que l’aiguille ne bougeait pas ! On lui donnera l’excuse de l’heure indue…
A 3h18, ma copine de la chaise roulante m’enlevait mon beau vernis rose-orangé. C’était bien la peine de se faire belle ! Là encore j’envisageai de protester. Mais je me rappelai le commentaire tout récent de ma mère à propos de sa propre opération : vernis interdit car le personnel médical peut ‘voir’ la pression sanguine à la couleur des ongles.
Je passais les deux heures suivantes sur la balle d’exercice que ma sage-femme avait réussi à faire passer en douce, à me tordre de douleur au gré des contractions. Je gérais à peu près jusqu’à l’arrivée de la gynéco. D’humeur quand même joyeuse, je voulus lui raconter la blague que le radiologue m’avait sortie le matin même : « si vous arrivez à accoucher naturellement de ce gros bébé (1) je viendrai vous serrer la main à l’hôpital ». Sauf que je ratai complètement mon effet : une contraction me secoua violemment en plein milieu de ma phrase et je dus la finir dans les larmes. Je compris que la gynéco crut que j’avais pris le radiologue au sérieux quand elle me lança en partant « allez, on va montrer à ce type comme il se trompe ! ». D’ailleurs j’appris plus tard que ce petit plaisantin de radiologue était un récidiviste : il avait choqué ma copine avec cette même vanne et, avec son sens de l’humour yougoslave, elle n’avait plus remis les pieds au laboratoire !
(1) Estimé à 3,6 kilos le bébé était dans la moyenne française – ce que j’ignorais – mais 900 grammes au-dessus de la moyenne indienne (3,5 vs 2,7 kgs, source : http://www.doctissimo.fr/html/sante/bebe/sa_308_normal.htm; http://www.babycenter.in/a1015212/your-low-birth-weight-baby#ixzz3PZguMc2A)
(A suivre…)
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