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lundi, 15 juin 2020

Comment le beau-fils indien appelle-t-il ses beaux-parents français?

Suite à mon post sur comment appeler sa belle-mère indienne, une lectrice m’a à juste titre demandé comment ça se paInde,beaux-parents,nomsssait en sens inverse. Alors j’ai cette fois-ci posé la question sur un groupe de Françaises mariées à des Indiens – pour pouvoir prendre en compte la question du tutoiement/vouvoiement qui n’existe pas en anglais, et de la barrière de la langue.

D’abord, en Inde, comment le mari appelle-t-il ses beaux-parents ? La réponse est moins facile à trouver que pour la femme. C’est que, traditionnellement, la mariée change de famille mais pas le marié, qui n’aura que peu de contacts avec sa belle-famille. Ça change dans les milieux urbains et modernes. Mais globalement, il les appellera aussi « mata-pita » (maman-papa), avec les différences régionales. Et on utilisera le vouvoiement, qui est également d'usage avec ses propres parents.

Quand l'étrangère a une relation avec un indien, le premier obstacle est son statut d'intouchable. Or, même entre Indiens, il n'est pas rare qu'un fils soit répudié s’il ne se marie pas avec la personne choisie pour lui ou hors de sa caste/milieu social. Mettons que la famille indienne accepte cet écart et choisisse de vivre avec cette tâche qu'il est difficile d'expliquer au reste de la société. La belle-fille étrangère devra alors prouver qu'elle peut s'intégrer à la culture (mission impossible dès le départ (sauf cas exceptionnels), au mieux elle arrivera à être à l'aise) et qu'elle ne va pas divorcer à la première occasion. Les beaux-parents indiens, malgré la colonisation britannique et l'accès aux films américains, ne connaissent de la culture ocicdentale (si tant est qu'on puisse en définir une) qu'une idée souvent restreinte et négative : les filles sont faciles, pas de respect de l'aînesse, trop de divorces, abandon des vieux à leur triste sort, etc.

De son côté, le partenaire indien qui intègre une famille non-indienne va devoir montrer qu'il est vraiment amoureux, qu'il va gagner de quoi faire vivre une famille, qu'il n'est pas que dans cette relation pour changer de nationalité etc. (La pression est sans doute moins grande si le partenaire en question vit déjà à l'étranger depuis un moment, il sera alors un peu plus assimilé.) En effet, en France ou ailleurs, on ne connaît pas grand-chose de l’Inde et les quelques stéréotypes n'en donnent pas une image glorieuse : pauvreté, prêts à tout pour quitter leur pays pour l'Europe, viols et non respect des femmes. Ça a de quoi faire flipper quelques parents. Et surtout, ça existe. De fait, j'ai récolté plusieurs témoignages de filles qui se sont fait balader pour la carte verte ou se sont fait jeter pour un mariage arrangé après des années de relations. Mais ce n'est pas le cas de tous les Indiens. Quoi qu'il en soit, ça fait un paquet de préjugés à faire tomber pour le pauvre Indien, surtout s'il s'installe à l'étranger par amour, où tous ces doutes ne seront pas que ceux de la famille. Bonjour la pression.

(Je trouve que le handicap de départ dans une relation mixte n'est pas le même pour un Indien que pour un non-Indien. Parce que ce dernier, venant du monde dit développé, a au fond de lui la certitude (à tort ou à raison, là n'est pas la question) que sa culture est "supérieure" et qu'il "a raison". Il/elle a souvent du mal à se mettre à la place du partenaire indien - surtout si il/elle n'a pas vécu en Inde - pour voir les choses d'une autre manière. Et souvent l'Indien(ne) manque d'arguments ou de technique d'argumentation pour faire valoir son point de vue – on (se) demande rarement "pourquoi" en Inde – et fait face à un esprit cartésien qui aime bien comprendre avant de suivre. Grosse différence culturelle.)

Pour les parents occidentaux, la pilule est parfois difficile à avaler, surtout quand la religion s'en mêle en plus des considérations raciales et sociales. Et il faut ajouter à tout ceci le problème de la langue, quand ils viennent d'un pays non anglophones. Avec d’un côté les parents français qui n’ont jamais ou presque utilisé l’anglais de leur vie ; et de l’autre des Indiens qui parlent très vite la langue de Shakespeare et avec un accent à couper au couteau. D'après les témoignages reçus, la plupart des maris essayent de baragouiner le français assez vite, et ça aide pas mal à casser la glace.

Néanmoins, en ce qui concerne en particulier les relations avec la belle-famille, passés les premiers moments (qui parfois se comptent en années) et le choc culturel (des deux côtés), j’ai le sentiment que les choses se passent quand même avec un peu plus de fluidité avec des beaux-parents occidentaux qu’avec les Indiens.

La majorité appellent les beaux-parents par leur prénom ; et un nombre non négligeable "maman-papa" – si ça doit faire bizarre aux beaux-parents au début, ils doivent s’y faire assez vite ! (sauf un témoignage particulier, où ce n'est apparemment pas passé...) 13% ne les appellent pas (on n’est pas loin des 15% d’étrangères qui n’ont pas de nom pour leur belle-mère) et ils sont autant à utiliser la feinte bien utile des noms de grands-parents. Le tutoiement domine un peu.

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Au-delà des situations de mixité des nationalités, sache quand même que la question de l’adresse des beaux-parents, pour les femmes et les hommes, restent un problème fréquent. Dans son livre Belles-filles (1999), Clotilde Lemarchant a interrogé 92 Normandes et Bretonnes et conclu que « de fait, presque toutes les femmes rencontrées pour cette enquête nous ont dit leur embarras et leur difficulté de nommer, tout au moins pendant les premiers mois voire les premières années. « C’était le problème. (rire) Même chose pour mon mari. Alors, on ne nommait pas » (Mme Lechapelain). […] L’évitement est donc, pendant les premiers temps, la tendance la plus courante. La gêne, l’inconfort, le malaise sont les sentiments que procure l’impossibilité de nommer, perçue comme un frein aux relations interpersonnelles. »