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lundi, 11 avril 2016

Petit retour sur 2015

Ah 2015... Merci! Merci pour ces découvertes : les joies de la maternité, l’hébétude du manque de sommeil, la panique des cheveux qui tombent et le bonheur des cheveux courts. Le tout sur fond de voyages, avec la Suisse, la Corse, la France, le Sikkim et le Kerala où nous avons trimballé le bébé. Avec la petite tache qui pourrait te mettre en l’air le décor : l’expérience de l’incohérence de l’Entreprise (en tout cas la mienne*) qui clame vouloir plus de femmes managers et les laisse gentiment couler quand la reprise des-dites femmes managers après un avènement est un peu houleuse.

Pour moi, le début de la fin a commencé en février quand, deux mois après la naissance de Bébé Samourai, je reçus un message de mon boss qui voulait raccourcir mon congé mat’ (de six mois selon les règles de la boîte, ou en tout cas c’est ce qu’on m’avait dit depuis que j’avais annoncé ma grossesse).

inde,bébé,congé maternité,reprise du travail,allaitementA ce titre : si quiconque se figure qu’un congé maternité s’apparente de près ou de loin à des vacances (comme moi avant l’arrivée de bébé) qu’il ou elle se détrompe. Certes il existe une espèce de mère accro au boulot qui achète un tire-lait dès le troisième mois de grossesse, accouche sans lâcher son Blackberry, engage une nounou dès la sortie de l’hôpital et bosse de la maison dès la première semaine. Mais le commun des mortelles a les neurones en berne (c'est hormonal) pendant un bon moment. Et comme un bébé, même le plus cool de la Terre (le mien en l’occurrence) mange toutes les 2-3 heures, il y a de bonnes chances que toute vidéoconférence soit interrompue par une tétée – auquel cas il ne reste plus qu’à couper le son du micro, bien ajuster la webcam et faire semblant de comprendre de quoi il retourne pendant cette réunion sur l’augmentation des salaires, sujet qui d’ordinaire déjà te passionne (ou pas) mais qui là te dépasse complètement.

Et puis au-delà du fait d’être complètement à l’ouest, il y a des mères qui ont envie de se concentrer sur leur bébé et juste pas envie d’allumer un ordinateur. LeMonde les (nous) a même catégorisées en « bobos écolos anticrise** » (excuse-moi du peu) – trentenaires, diplômées, bosseuses et ambitieuses, qui se transforment en championnes de l’allaitement : elles n’ont qu’une chose en tête, survivre et allaiter leur bébé. Acharnées elles ne lâchent rien ; pour donner le ton, des fois elles en arrivent à hurler (intérieurement) de douleur et pleurer (en silence), à mettre de la crème et des protections mammaires en plastoque mais ces p… de tétons gercés ne lui feront pas louper une tétée ! Dans la foulée elles n’hésiteront pas à continuer l’allaitement après les six mois prescrits par l’OMS ; voire après un an, soyons folles ;-) Ni même à emmener (en cachette) rejeton et grands-parents à un séminaire en France pour pouvoir continuer à donner le sein…

Et ben ces mères-guerrières, elles estiment qu’elles méritent qu’on les laisse tranquilles pendant quelques semaines, ne serait-ce qu’au nom de tous les efforts extraordinaires fournis pendant des années (et même jusqu’à 8 mois et demi de grossesse) pour prouver qu’elles sont aussi capables et rentables pour l’entreprise qu’un homme. inde,bébé,congé maternité,reprise du travail,allaitement

C’est peut-être très « bobo », voire un peu prétentieux d’affirmer, dans ces temps de crise et d’insécurité de l’emploi, qu’on les fera pas chier. Mais elles sont comme ça, elles en ont le pouvoir – même si il leur faut parfois l’aide d’un coach pour s’en rendre compte.

Donc quand on te met la pression pendant ton congé pour répondre aux mails  (des mails? Quels mails? Mais il te faut une semaine pour arriver à trouver le courage de te couper les ongles des pieds alors imagine allumer un PC ! Voilà maintenant tu comprends... que les mails... ben... comment te dire…), et puis pour rattraper le retard des six mois passés – mais ça marche pas, y a rien à faire, tu comprends rien à rien, t’arrives même à te rappeler si t’as pris une douche le matin même c’est dire. Donc tu ravales tes larmes, essayes de faire bonne figure et espère que ça finira par s’arranger. D’ailleurs ça finit par s’arranger, quand les hormones finissent par se calmer, ou juste quand la tempête passe. Mais la pilule reste quand même bien amère à avaler, même une fois la confiance en soi retrouvée et les objectifs atteints. Une fois à nouveau à flot, tu démissionnes. Et là c’est mis sur le compte d’une « crise de la maternité », i.e. une décision inconsidérée qui sera vite regrettée.

Et y a certainement un peu de vrai. Peut-être que, dans mon cas, ce retour difficile de maternité a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, dans un contexte où, pour être tout à fait honnête, j’étais un peu usée. Mais quitter une boîte qui t’a tout appris, un patron qui t'a tout appris et développée et t’a fait sentir « talentueuse » n’est pas si évident. Heureusement j’ai été aidée par ma nouvelle entreprise qui m’a contactée quelques semaines après ma reprise. Pour être précise, je venais tout juste de cramer mon tire-lait. Profitant que le bébé m’offrait – de façon très inhabituelle – deux-trois heures de répit, absorbée par la préparation d’un séminaire, j’oubliai l’accessoire dans la casserole dans laquelle il était en voie de stérilisation. Incident qui a son importance puisque la boîte en question fabrique… des tire-laits ! Mais oui mais oui !!

* En faisant un peu de recherches, il apparait qu’à peine 25% des femmes reprennent le boulot en Inde. Qui d’ailleurs tient la place 115 (sur 128) des pays sur l’échelle de l’émancipation des femmes au travail. Les entreprises virent les femmes enceintes, ou leur réduisent leur salaire et en général leur mène la vie dure. Mais il y a aussi plein de boîtes indiennes qui ont un programme « Retour au boulot ». Personnellement je préfère le terme « Retour au bureau » parce que je trouve que rester à la maison c’est un vrai boulot :

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Voici un exemple de ces entreprises qui investissent pour garder ou recruter des talents féminins qui ont pris un break – parce qu’une carrière n’a pas besoin d’être toujours linéaire…

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** « Aujourd’hui, l’allaitement maternel trouve sa place chez une population de trentenaires fortement diplômées. Cette pratique est en phase avec leurs idéaux, leurs réflexions personnelles, leur rapport au travail, au couple, et se marie bien avec une vague écolo, bobo, anticrise… » Source : http://mobile.lemonde.fr/societe/article/2015/09/22/pourq...

 Dessins de: http://www.awesomeinventions.com/doodle-diary-of-new-mom/

lundi, 12 octobre 2015

Dodo, l'enfant do... (Dormir en Inde et en France)

Un ami (indien) s’est pointé à l’improviste samedi soir à 21 heures. Quand il se ‘plaignit’ de ne pas pouvoir voir Bébé Samourai, je lui expliquai qu’il dormait depuis une heure. Seulement pour m’entendre dire : « Arrête de faire ton Allemande ! C’est quoi cette histoire d’imposer des horaires à un bébé ? »… Voilà, tout est dit… 

Le sommeil est l’une des grosses différences culturelles entre l’Inde et la France. Inde,dormir,dodo,sommeil,bébé,faire ses nuits,éducation,pleurer,Tracey Hogg,Sleepsensetraining,Hélène StorkPar exemple, en Inde, il n’est pas rare que l’on te cause pendant que tu dors, ou que l’on fasse le ménage dans ta chambre, voire même qu’on t’apporte un chai. Et personne ne penserait à fermer la porte de la chambre quand il lance un film dans la pièce voisine. Les rares fois où je me paye une grasse mat’ jusqu’à onze heures mon Indien préféré se met dans tous ses états et vient me solliciter plusieurs fois…

Ça doit être lié aux conditions de vie : à vivre nombreux dans peu de pièces, personne ne peut s’offrir le luxe d’une belle sieste ininterrompue, ou dans le silence (il est vrai qu’il vaut mieux apprendre à dormir dans le bruit en Inde, c’est assez une question de survie). En Inde on dort parce qu’on doit dormir, on ne se complait pas dans le repos. C’est un peu moins vrai pour la bouffe, pourtant un besoin physiologique au même titre que le sommeil. 

C’est donc la même chose avec les bébés (1). Ils vivent au rythme de la maisonnée. Voire pire : si les parents travaillent beaucoup, il n’est pas rare qu’un bébé se couche à minuit passé pour pouvoir jouer un peu avec son père.

En Inde, l’enfant dort avec sa mère. Et donc a priori avec le père. Sauf si ce dernier souhaite ne pas être réveillé (par les cris ou les coups de pied), auquel cas il ira dormir où il pourra (parterre, sur un matelas, ou dans un autre lit, ou sur le canapé). J’ai des exemples à foison. L’intimité du couple ? Même avant bébé, c’est déjà un concept peu répandu (encore une fois lié au mode de vie en sardines et sans doute un peu aussi à cause du mariage arrangé). Et même si ça l’était, le bébé passe avant tout. Et il doit dormir avec sa mère, pour pouvoir téter à volo et « créer des liens d’amour ». Dans un tel contexte, le bébé n’a pas besoin d’apprendre à s’endormir tout seul, ni à se rendormir tout seul ; et puis on ne va pas le laisser pleurer plus de deux secondes. L’enfant est roi en Inde, au moins les deux- trois premières années (après c’est nettement moins drôle, la réalité tape à la porte).

Que la mère finisse éclatée à se réveiller continuellement à cause des coups de pied ou d’une bouche avide de succion, on s’en tape (surtout après les premiers mois pendant lesquels elle est très aidée de sa propre mère, pour se remettre de l’épreuve physique de l’accouchement). 

La mère éclatée c’était donc moi, depuis que Bébé Samourai avait décidé que dormir la nuit c’était bon pour les imbéciles, le jour de ses 4 mois. Enfin il dormait, mais se réveillait toutes les deux heures (dans le meilleur des cas). En plus nous voyagions pas mal, et il dormait souvent avec nous. J’avais essayé à 5 mois la méthode de Tracey Hogg pour lui apprendre à s’endormir, mais j’étais déjà trop faible à cause du manque de sommeil pour supporter une heure de pleurs et je décidai que 1.Il était trop petit, 2. Les Occidentaux étaient un peu trop durs dans la manière d’éduquer leur bébé, 3. Les Français étaient bien sans-cœurs de laisser le nouveau-né seul dans son lit dans sa chambre dès le premier soir.

Et là je suis devenue hagarde. Pas déprimée non, mais un vrai zombie. Mon objectif chaque jour étant d’arriver à donner le change (et maîtriser la technique de dormir les yeux ouverts). Il faut dire qu’en plus des micro-nuits, il y a l’allaitement. Et l’allaitement c’est bien, mais c’est pas toujours une sinécure : ça pompe de l’énergie, quand il tête, et encore plus quand on doit s’organiser pour tirer son lait. J’avais donc abandonné l’idée que Bébé Samourai (et donc moi par la même occasion) puisse un jour dormir une nuit entière, en tout cas pas avant de quitter la maison…

Et voilà qu’un beau soir, une copine française mariée à un Indien m’envoie un document pour « Apprendre à dormir » (SleepSenseTraining (site web) qu’elle compte essayer. Je lui explique que personnellement j’ai lâché l’affaire et que j’attends que les choses s’arrangent d’elle-même. Et puis par curiosité, parce que je n’avais rien d’autre à faire et que j’avais mon téléphone à la main, j’ouvre le bouquin. 45 minutes plus tard, Bébé Samourai se réveille et je décide de tester cette technique illico presto. Comme un noyé s’accroche à une bouée de sauvetage. La dernière chance quoi ! Après avoir pleuré trois-quarts d’heure, il dormait à poings fermés. Et en une semaine (avec des hauts et des bas) il dort presque toute la nuit, plus de 10 heures. On me l’aurait dit que je l’aurais pas cru ! 

Ceci étant-dit, j’ai fait les choses un peu à ma sauce. D’aucuns argueront que je prends le meilleur de chaque culture, mais vraiment, je suis juste mes instincts. C’est ainsi qu’on a une routine pré-coucher qui inclut un massage, qu’il se couche à 20 heures et qu’il dort dans son berceau. En revanche il dort dans notre chambre et je ne le forcerai pas à s’endormir sans personne dans la chambre ; je continuerai à le prendre dans les bras pour le calmer si il en a besoin et je suis un peu flexible sur les siestes. J’ai été d’ailleurs confortée dans cette approche par le peu que j’ai pu lire des travaux d’Hélène Stork qui a comparé « comparé les pratiques du maternage en Occident avec celles d'autres pays, notamment de l’Inde du Sud » et dont je viens de commander l’ouvrage Enfances indiennes (2). 

Quoi qu’il en soit, Bébé Samourai dort et moi je revis – en fait je suis presque fatiguée de trop dormir mais je vais pas me plaindre hein…

 

 (1) Résumé des différences de maternage :

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Source : https://www.cairn.info/revue-spirale-2005-2-page-151.htm

 

(2) Hélène Stork, Enfances indiennes. Etude de psychologie transculturelle et comparée du jeune enfant, Paris, Paidos/Le Centurion, 1986

Assurant une consultation médico-psychologique dans un centre PMI de la banlieue parisienne, Hélène Stork a constaté de nombreux troubles psychologiques chez les jeunes enfants. Forte de l’intuition que ces difficultés témoignaient, entre autres, du malaise de toute une société, elle a comparé les pratiques du maternage en Occident avec celles d'autres pays, notamment de l’Inde du Sud (pays tamoul), où elle a séjourné longuement, à plusieurs reprises. A l’instar de l'ethnologue, elle a mené sur le terrain des recherches cliniques approfondies, alliées à l'étude des textes sanskrits anciens qui fondent les techniques indiennes de soins infantiles. Cet ouvrage, après avoir défini la psychologie transculturelle (histoire, méthodes, buts), décrit avec une très grande précision (grâce, en particulier, à l'enquête filmique) les gestes et les postures du maternage en Inde du Sud, apportant une riche contribution à l’étude de la vie psychique des bébés durant les six premiers mois. Au terme de son travail, Hélène Stork formule une question pour l’Occident : « L’organisation sociale de la famille permet-elle aux femmes (aux parents) de pratiquer un maternage favorable au développement sensori-moteur et à la bonne santé mentale du petit enfant ? »

 

lundi, 14 septembre 2015

Une histoire de mariage, cheveux, rugby et bibine

Toute ressemblance avec des personnes existantes est fictive. Ou pas. 

Notre petite famille a récemment effectué son pèlerinage annuel au Kerala, organisé de sorte à pouvoir assister à un mariage. (Des fiançailles en vrai mais ça aurait pu aussi bien être un mariage alors on fera comme ci.) Je n’étais pas sûre sûre que ce soit une bonne idée : j’avais, en toute modestie, peur que mon petit samouraï et moi-même ‘volions la vedette’ à la mariée (le ‘blanc’, surtout quand c’est la première fois qu’on le voit, a une fâcheuse tendance à attirer l’attention). J’ai eu tort. Personne ne pouvait vraiment voler la vedette à la mariée, tout simplement parce que tout le monde s’en tape, ils ne pensent qu’à bouffer (dixit mes amis malayalis).   

 

Je suis arrivée, un peu angoissée parce que j’avais oublié de mettre du déo. Or je ne sors JAMAIS sans déo. A fortiori dans un endroit où il fait 35 degrés et 110% d’humidité. J’ai bien essayé d’en acheter à la pharmacie mais dans les intérieurs du Kerala, t’oublies le déo. Là encore, j’ai eu tort de m’en faire : pas plus tôt arrivée, une tante m’alpagua et me mit direct dans l’ambiance. Elle refoulait à cinq mètres la transpi qui a bien macéré !! Elle commença par essayer de dessaper mon bébé, habillé en petit Indien pour l’occasion, sous prétexte qu’il avait trop chaud. Sans bien sûr me demander mon avis. C’est sûr qu’elle, elle devait avoir bien chaud pour sentir comme ça ! Pas ébranlée de sa défaite (je ne la laissais pas aller plus loin que le min gilet sans manche), elle enchaîna – elle était en forme ! – avec un agréable commentaire quelque peu homérique « ta coupe de cheveux, c’est moche. » Estomaquée, je ne trouvai rien à répondre, et m’éloignai. Venant de sa part, c’était un peu l’hôpital qui se moque de la charité : le cheveu se raréfiant, sa maigre tignasse était rassemblée en une queue bien pathétique et surtout dégoulinant d’huile. Alors ça je ne comprends pas. Huiler les cheveux pour les nourrir, ok. Mais sortir avec les cheveux gras ?? Ptêt qu’ils trouvent ca beau quand ça luit ? Comme des chaussures bien lustrées ? Inutile de préciser que le cheveu gras, c’est ma hantise, au même niveau que des aisselles odorantes… 

 

Passé cette petite mise en jambe, il fallut faire face à une autre situation : en Inde, un bébé perd son statut de personne et devient un ballon de rugby. Dès qu’ils voient un bébé, les bras se tendent, ils l’attrapent et se le font passer. Je ne dois pas être un très bon demi de mêlée : à la vue de ces veilles, une avec des dents pourries, l’autre avec une barbe et encore une autre sans dent et avec une moustache, je ne lâchai pas le ballon. Pour être honnête, je ne le lâchai à personne, même à celles qui faisaient pas peur. Juste parce que les trois paires de bras tendus qui nous accueillirent me renvoyèrent dans mes cages, fuyant ce que je ressentais comme une agression. Alors qu’il s’agirait en fait d’une « politesse » de demander à porter les bébés, politesse que j’étais sensée retourner en donnant mon enfant. Et ben je vais te dire, passer pour une connasse malpolie rien à taper !! En bref, j'ai complètement pris le contre-pied, ça arrive...

D’autant que mon petit jouait le jeu et refusait de quitter mes bras. Bien sûr loin de moi l’idée de vouloir en faire un asocial. Non, je voulais juste lui laisser le temps de s’habituer à toutes ces nouvelles têtes avant de le jeter dans la mêlée !   

Toutes les bonnes femmes (et quelques bons hommes) ayant essuyé des revers, on finit par nous laisser tranquille. J’en profitais pour laisser le petit samouraï se dégourdir les jambes. Et il n’eut pas plus tôt les pieds posés au sol qu’un ‘uncle’ identifia une ouverture et se saisit du bébé ! Qui finit par tourner dans les bras de quatre femmes même pas de la famille de mon mari…  

 

Le mariage en lui-même se déroule dans une salle des fêtes ou dans une salle d'un temple. Les fiancés sont sur une scène dont ils ne décolleront pas. La cérémonie dure une dizaine de minutes, pendant laquelle les gens regardent – si ça dure plus longtemps, il se peut qu’ils aillent vaquer à leurs occupations en attendant la fin. Ensuite le buffet est annoncé ! (Pour l’occasion à 5 heures de l’après-midi.) C’est un peu le challenge ce repas : non seulement y a une queue monumentale avec les 500 personnes qui se jettent dessus, mais une fois que tu as attendu que tout le monde ait fini pour prendre ton plat, et ben les 500 autres qui sont passés à la digestion viennent te parler ! Tu te retrouves donc à être présentée à des ‘uncles’ et ‘aunties’ (formules de politesse pour adresser des aînés, surtout dans le nord de l’Inde), la bouche pleine et les doigts trempant dans le curry. Pas évident de rester classe. Donc quitte à être malpolie, au grand dam de mon mari, je décidai d'ignorer une ou deux personnes qui me furent présentées et me concentrai sur mon plat, histoire d’en finir au plus vite avec cette épreuve, et aller récupérer mon petit.  

 

Une fois que tu as fini de boustifailler, tu dois aller sur scène prendre une photo avec les mariés. Sinon les gens oublieront que tu es venu et te le reprocheront plus tard. (Je rigole.) C’est également une distraction bienvenue pour le couple qui est sinon obligé de taper tout seul des pauses bollywood pour le photographe. (Je rigole pas.) 

 

Voilà, c’est à peu près tout ce qui se passe dans un mariage hindou au Kerala… A 18 heures c'est bouclé et chacun regagne ses pénates. Ou se planque derrière la salle des fêtes pour picoler. Entre hommes. Et en cachette. Même si tout le monde le sait*. Les autres rentrent chez eux, tout contents d’avoir un nouvel évènement à commenter ! Même si il n’y a pas grand-chose à se mettre sous la dent, à part la nourriture et la coupe de cheveux de l’étrangère (qui a fait sensation, même pas dans le bon sens j’en ai peur). 

 

Moralité : je serai éternellement reconnaissante à mon Indien préféré de m’avoir épargné ça et d’avoir fait de notre mariage un évènement qui restera dans les annales. Et j’attends avec impatience d’assister à un mariage en France pour avoir son point de vue !! 

 

 

* Les statistiques montrent que les Indiens boivent moins que les Européens (4,3 versus 12,5 litres par an) sauf qu’il faudrait retirer les femmes (qui n’ont pas le droit de boire), les hommes pieux (qui ne boivent pas par conviction religieuse), et tous ceux qui boivent de l’alcool maison, qui tue en silence, sauf quand il tape un grand coup et fait plus d’une centaine de morts (comme c’est arrivé en juin à Mumbai). Les Kéralais sont à un petit 10,2 litres par an, assez loin derrière les gars de l’Andhra Pradesh (35 litres). Toujours est-il que dans de nombreux Etats indiens, les taxes sur l’alcool représentent près du quart des revenus de l’Etat (22% au Kerala) ; quand on est à moins d’1% en France. Ça complique pas mal de choses quand les Etats se mettent en tête de réduire les ventes d’alcool, comme c’est le cas régulièrement un peu partout. Seul le Gujarat tient bon, mais le marché noir explose. Augmenter les taxes (déjà à plus de 100%) ou rendre l’alcool illégal c’est bien beau mais ça ne résout pas grand-chose…  

 

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(1) En Inde : http://indianexpress.com/article/india/india-others/kerala-increases-tax-on-liquor-beer-and-wine/#sthash.PNIRO4yJ.dpuf ; http://articles.economictimes.indiatimes.com/2015-05-16/news/62239496_1_total-prohibition-vm-sudheeran-kerala-government ; http://www.thehindubusinessline.com/economy/the-alcohol-economy/article5436924.ece ; http://www.thehindu.com/opinion/blogs/blog-datadelve/article6344654.ece

 

(2) En France : http://www.alcool-info-service.fr/alcool/consommation-alcool-france/culture-alcool-consommation-vin#.VfZl8Jf3aJ8 ; http://www.insee.fr/fr/themes/comptes-nationaux/tableau.asp?sous_theme=3.2&xml=t_3203 ; http://next.liberation.fr/vous/2011/02/17/quels-sont-les-pays-qui-consomment-le-plus-d-alcool-dans-le-monde_715595