lundi, 14 avril 2014
Le mariage indien pour les nuls - 1. Le mariage arrangé
Le « mariage indien » (je devrais dire le mariage hindou pour être exacte) a déjà fait couler beaucoup d’encre, fait l’objet de beaucoup de films, occasionné nombreux voyages en Inde. Bref c’est une institution. Je m’efforce ici d’y comprendre quelque chose !!
Le mariage arrangé : et pourquoi pas ??!
Commençons par faire le distinguo entre mariage arrangé et mariage forcé.
Si je peux dédramatiser le mariage arrangé (lire ci-dessous), impossible de faire de même avec le mariage forcé qui reste quand même largement pratiqué en Inde : 40% des femmes n’auraient pas leur mot à dire quant au choix du mari, moins de 20% des femmes (de plus de 25 ans) connaîtraient leur mari avant la date fatidique et pire, près de 50% des femmes auraient été mariées avant l’âge légal de 18 ans (source).
Ce qui veut dire qu’il y a encore des milliers de gens (hindous) qui, chaque année, suivent la tradition et ne découvrent qu’une fois le drap tombé avec qui ils vont passer le restant de leur vie : SURPRISE !!! La coutume veut que le marié s’installe en premier, et qu’on lui cache la vue avec un drap, ôté une fois la mariée amenée par son oncle maternel et ses cousines et les consentements des parents échangés. Le drap est simplement une version moins sexy (mais plus prometteuse ;) ) du voile utilisé dans les mariages catholiques arrangés originellement pour masquer le visage de la mariée (source).
La notion de mariage arrangé, encore très prévalent en Inde (plus de 90% des cas), a tendance à choquer les Occidentaux. Avant de crier au loup et de taxer les Indiens d’ignominie, rappelons quand même que de la Rome Antique jusqu’au 19ème siècle (soit 2 500 petites années), le mariage de convenance était la norme dans nos civilisations. La famille était alors une « entreprise de survie sociale ou économique » et le mariage un « contrat » permettant d’en assurer la pérennité*.
Quid de l’amour dans le mariage arrangé ?? Quand un Occidental pense mariage arrangé, il pense tout de suite à la jolie fille qu’on marie au vieux pou du coin, trop moche et trop con pour se trouver une femme tout seul ! Alors qu’en fait, les parents cherchent quelqu’un qui corresponde au mieux – et a priori ils connaissent bien leur rejeton ! Et y a un paquet de critères à remplir : la religion, la caste, la couleur de peau (critère primordial de beauté), le revenu, la géolocalisation, le régime alimentaire (végétarien vs non-végétarien) l’horoscope pour ne citer que les plus importants.
Quoiqu’il en soit, il est fort probable que deux « puceaux de l’amour », que beaucoup de choses rapprochent (voir les critères susmentionnés), qui n’attendent que ça depuis leur tendre enfance, finissent par s’aimer (ils le veulent !). La passion, l’enflammement des corps et du désir, est moins garantie mais en même temps c’est connu pour être éphémère, n’est-ce pas ?? ;)
Soyons honnête : qui ne s’est pas dit au moins une fois, alors que le célibat et la trentaine battent leur plein, que les rencontres sur internet n’ont mené qu’à des échecs (c’est-à-dire au mieux des plans cul divertissants), que le stock d’amis d’amis célib’ est épuisé, que l’angoisse de finir vieille fille bouffée par son chat fait une boule tellement grosse dans la gorge que même la Haagen-Dazs ne passe plus : « si seulement mes super parents qui ont (presque) toujours exaucé mes caprices pouvaient trouver chaussure à mon pied » ! Qui n’a pas eu envie de passer ce coup de fil, impensable et pourtant potentiellement salvateur ??!
Dans la même veine, on est quand même un peu hypocrite de critiquer le mariage arrangé quand on voit le succès des sites de dating en Occident (en 2007, 1 mariage sur 8 aux US était un couple qui s’était rencontré en ligne ! source).
Et puis même si ce n’est pas écrit noir sur blanc, si ce n’est pas o-bli-ga-toire, nous sommes majoritairement un peu endogames – la plupart de mes amis ont épousé des gens de leur tribu, et c’est certainement plus facile à gérer que pour les hurluberlus qui se dénichent un partenaire d’un autre pays, d’une autre couleur, d’une autre religion ou d’une autre classe sociale. Plus facile parce que deux endogames n’ont à surmonter que les différences de genre et de personnalité et pas tout le reste. Mais c’est sans doute moins folklo et moins enrichissant aussi !
Donc quand tu creuses un peu, tu te rends compte que ce qui choque surtout mes congénères, ce n’est pas tant l’ « arrangement » en soi mais plutôt l’idée de ne pas avoir « testé la marchandise avant achat », de se retrouver le soir de la nuit de noce au lit avec une inconnue… J’avoue que dans notre culture où le sexe est omniprésent, obsessionnel, glorifié, survalorisé ( ?), l’idée est rebutante. En plus elle est mauvaise si j’en juge les expériences de mon entourage (indien) : union non consommée, pratiques chelous, bien souvent l’homme n’est pas à la hauteur, et ce jusqu’au divorce ! Voir un jeune couple qui part en lune de miel et n’a rien à se dire les premiers jours (avant que les choses se réchauffent) me surprend à chaque fois, et me fait cogiter à la bizarrerie (de mon point de vue) de la situation.
Et pourtant ça reste la règle. Aux chanceux, le « choix » de refuser une candidature est de plus en plus offert. Existe également l’option de présenter quelqu’un (de l’université, du bureau) et si les critères sus-mentionnés sont remplis et que l’union a lieu, on la qualifiera de « mariage d’amour » (sans qu’il y ait, bien souvent, une réelle relation amoureuse). Les vrais mariages d’amour, guidés par la passion et défiant les critères sus-mentionnés, restent très rares et se finissent souvent dans un bain de sang (en particulier dans les milieux défavorisés).
C’est pourquoi la passion est exaltée comme le Saint-Graal (un truc dont tu rêves mais que tu n’auras pas) dans les films, et dénigrée dans les familles comme source d’emmerdes (l’incontrôlable versus les codes sociaux qui régissent une vie bien ordonnée).
* « Ce n’est qu’au cours du 18ème siècle que la famille a cessé d’être considérée comme une entreprise de survie sociale ou économique pour se fonder de plus en plus sur le sentiment amoureux […] Le changement évoqué a été influencé par des facteurs économiques tels l’industrialisation, l’ouverture des marchés, le salariat, l’amélioration progressive des conditions de vie mais aussi par un encouragement de l’Eglise et de l’État. […] On constate, par exemple, qu’il existe encore de nos jours et malgré la diversification des sociétés contemporaines qui sont souvent multiculturelles, une tendance assez généralisée à contracter un mariage à caractère plutôt endogame; le choix du partenaire étant souvent influencé par l’origine sociale, l’appartenance ethnique, raciale ou religieuse. » Source : http://www.asblcefa.be/cefa/images/pdf/9mariagearrange
« Le mariage est avant tout un contrat passé entre un homme et une femme. Par la suite, le libre consentement se développe, et le mariage par amour se substitue peu à peu au mariage de convenance au cours du dix-neuvième siècle, en parallèle avec l’évolution du rôle de la femme dans la société, visant à l’égalité avec l’homme. Ce processus culmine avec la légalisation du divorceen 1884. » Source : http://www.mariages.net/articles/origines-et-histoire-du-mariage--c5102
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jeudi, 10 avril 2014
Gare!
« Quand j'étais petit, mes parents me disaient: « Finis ton dîner. Y a des enfants en Chine et en Inde qui meurent de faim. »
Je dis à mes filles : « Finis tes devoirs. Y a des enfants en Inde et en Chine qui tueraient pour ton job. » »
Thomas Friedman
08:00 Publié dans IncredIble India, N'imp | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : inde, citation | Imprimer | Facebook |
mardi, 08 avril 2014
Histoires de viol et de pastèques
Une amie française et moi-même, toutes deux de longue date en Inde, avons eu une conversation intéressante avec un Indien, la trentaine, sympa, propriétaire d’un hôtel à Goa. Un mec un peu rentre-dedans (pour rester soft).
Dialogue sur le viol en Inde (dont la médiatisation a explosé ces quelques dernières années – du coup on sait plus trop si il y a plus de cas ou surtout plus de publicité ou si plus de publicité encourage les femmes à se déclarer victimes) :
- Lui : Tu ne comprends rien à la culture indienne, qu’est-ce que tu connais du fonctionnement des villages. Depuis quelques années les journaux se sont mis à vouloir faire du business et font tout leur beurre avec les viols.
- Elle : …
- Lui : Par exemple, si une villageoise se fait violer, les autorités (le panchayat) obligeront le coupable à épouser sa victime, comme ça elle ne sera pas marginalisée et elle sera protégée (par son mari) !
- Elle : Là tu vois, c’est peut-être juste mon point de vue d’Occidentale, mais en tant que femme je trouve ça atroce d’être obligée de se marier avec son violeur. Même si c’est la seule solution pour que tous les alcoolos du bled me passent pas dessus après…
Dialogue sur le découpage d’une pastèque :
- Lui (qui jeûne ce jour-là et n’a droit qu’à du lait (mais pas en carton) et des fruits) : Tain, j’arrive pas à découper c’te pastèque.
- Moi (hôte bien élevé) : Bah attends je vais te le faire !
- Lui : Ok ! Mais tu pourrais te laver les mains avant ? Rien d’impur ne doit toucher ma nourriture aujourd'hui et peut-être que tes mains ont touché ta bouche.
- Moi : Ok ! Ben tu sais quoi, tu vas te la découper toi-même ta pastèque !!
Non mais attends ! Je sais qu’il y a des règles spéciales en Inde, surtout pour la nourriture. Les Brahmanes ne doivent manger que de la nourriture cuisinée par des Brahmanes. Les Hindous jeûnent certains jours – ils ont souvent un jour de prédilection dans la semaine, suivant leur divinité préférée. Il me semble que scientifiquement c’est plutôt bien de jeûner un jour par semaine. Et puis ça a du sens quand les gens n’ont pas de quoi se payer à manger tous les jours ; c’est ensuite récupéré par la religion et puis les gens oublient pourquoi ils font ce qu’ils font. Soit.
Que mes mains soient impures, soit. Apparemment une fois à table on (c'est valable pour tout le monde) ne devrait pas toucher aux récipients que les autres pourraient toucher. Bref pas de contact entre la nourriture de chacun, pas de contamination, et les moutons sont bien gardés.
Maintenant que MES mains soient impures un jour par semaine, celui où IL décide de jeûner, j’ai trouvé ça fort de pastèque ! Il aurait pu me demander si j’avais pas mes règles pendant qu’il y était (pasque là, dans l’Hindouisme, plus impure tu meurs…)…
Voir ce site.
08:00 Publié dans Histoires de Samouraï, IncredIble India | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : inde, purité, mains | Imprimer | Facebook |