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mardi, 19 août 2008

Du Pouvoir de l'Inde

Je participai récemment à une formation interculturelle afin de préparer deux jeunes indiens à leur séjour (professionnel) en France. Mon rôle : « spécialiste pays », i.e. chargée de compléter le discours du formateur avec des anecdotes sur la France, son monde du travail et sa vie de tous les jours. Super intéressant !! Et surtout bien loin du blabla auquel je m’attendais. Bref une formation qui serait utile à tout Français s’implantant en Inde…

En souvenir, voici la « Courbe d’ajustement de l’expatrié » The Adjustment Curve of the Expatriate.pdf ou comment évolue le moral de l’expatrié (quel que soit le pays d’origine et celui d’accueil).

La Courbe d'Ajustement de l'Expatrié.JPG

Source : Aperian.

A mon avis cette courbe subit quand-même des pics d’intensité dans certains pays, notamment en Inde…

Ce qui me permet de rebondir sur le « syndrome de l’Inde ». Je m’explique : lors de ma dernière visite en France, la pharmacienne, à qui j’ai dû raconter que j’habitais en Inde, m’a directement demandé si j’avais subi le syndrome de l’Inde, si j’avais passé des heures à pleurer, prostrée.

En me renseignant, j’ai trouvé que France 5, l’Humanité et plein d’autres ont consacré des reportages à ce fameux syndrome (que j’ai précédemment cité en référence au livre Fous de l’Inde). Voici comment en parle le site pyschologies.com : « Dès l’arrivée dans le pays, il se manifeste sous forme d’angoisse ou de tristesse inexplicable. Quelques semaines plus tard, des symptômes plus alarmants, hallucinations ou délires psychotiques, peuvent apparaître chez certains voyageurs. " Ils vivent alors une véritable dépersonnalisation, que j’appelle “l’épreuve de l’Inde” ", affirme le psychiatre. Ces voyageurs commencent par égarer leur argent, leurs affaires, avant d’oublier leur nom, leur identité ; ils entrent dans une forme d’errance, ou éprouvent des sentiments d’extase sauvage… »

 

Mais rendons justice au reste du monde : on a également parlé du « syndrome de Jérusalem », du « syndrome de Florence » (extase provoquée par les lieux respectifs) et du « syndrome de Paris » (des Japonais surtout pètent parfois un câble à cause de la déception causée par la ville de l’amour). Moi je crois que j’ai échappé au syndrome de l’Inde, pour mieux être anéantie par un « syndrome de l’Europe » : lors de mon dernier séjour j’y ai tout perdu, passeport, carte de crédit, capuchon d’appareil photo, clé, j’en passe et des meilleures !! (en référence à, plus haut : « Ces voyageurs commencent par égarer leur argent, leurs affaires, avant d’oublier leur nom, leur identité »)

 

Pour conclure, soyons honnête. Il arrive vraiment que des voyageurs écourtent leur séjour en Inde qui leur devient trop insupportable. Et chacun prend une bonne claque en venant ici. Maintenant, ce fameux syndrome ne touche qu’une infime partie des voyageurs et ne devrait empêcher personne de venir : suffit de se préparer !

 

Enfin il y aurait apparemment un autre Syndrome de l’Inde, autrement plus préoccupant : celui-ci au lieu de provoquer les larmes et l’apathie déclencherait un désir de buter des Indiens. Tout le monde qui séjourne longtemps ici (non Indien s’entend) pique à un moment donné une crise, pète un câble, a envie de tout envoyer balader. Mais alors c’est étonnant de voir comment la littérature retranscrit ça : dans le Vice-Consul de Marguerite Duras, le type sort la nuit abattre des lépreux à la carabine, et dans Parias de Pascal Bruckner, le principal protagoniste devient tueur en série d’Indiens miséreux. Flippant ! Tenez bon les gars…

 

jeudi, 10 juillet 2008

Enregistrement au Foreigner's Registration Office

Nous en parlions il y a peu sur ExpatPune Google Groupe. Le F.R.O.. Le Foreigner’s Registration Office. Un coin sympa à visiter si on a le temps (humour) – et visiblement les Français ici sont assez désœuvrés (cf. les mails du groupe). Mais bon, même si on n’est pas désœuvré, à partir du moment où l’on reste plus de 180 jours en Inde, l’enregistrement est obligatoire.

Alors il faut y aller. L’adresse (qui vient de changer) :

Foreigner’s Registration Office / Police Ground

Ganeshkhind Road / Shivaji Nagar

Tel:  020 26208585  (ils redirigent vers le F.R.O.)

Horaires : 10h30 – 18h (attention, la dépose est de 11h à 14h seulement - 16h pour aller chercher la registration).

Dépose des papiers pour enregistrement : counter n°1 : celui où y a une queue monstre (sur la droite).

Et attention, bonjour les documents ! Le mieux c’est de venir une 1ère fois en touriste, avec son passeport/visa, et de demander exactement quels formulaires remplir. Généralement il faut (en plus des originaux qu'ils peuvent demander pour vérification):

  • La Form A en 4 exemplaires (je l’ai même scannée !) : FRO Form A.pdf
  • 4 photos
  • 1 photocopie du passeport
  • 1 photocopie du visa + tampon d’entrée
  • 1 photocopie de la preuve de logement
  • Si visa business : 1 « undertaking » sur papier en-tête et 1 « assignment letter » sur papier en-tête aussi.

Après ça, le F.R.O. nous donne un papier (avec un délai de 1 jour à 1 mois). Il est souvent demandé à l’aéroport lors du départ et bonjour les dégâts si on l’a pas (même si perso ça m’est jamais arrivé qu’on me le demande).

Attention, il faut faire la demande dans les 2 semaines après l'arrivée en Inde. Sinon amende...

Voilà, bon courage !

PS : Par rapport à certaines remarques sur le groupe, il faut beaucoup de temps, de la patience, accepter de revenir plusieurs fois (comme à la mairie en France en fait) mais si les papiers sont bons, pas de bakchich.

PPS : Je ne fais pas de la pub pour le F.R.O. mais après avoir cherché ces infos un bon moment j’ai pensé les faire partager…

lundi, 05 mai 2008

Chronique - Jouir (à tout prix) sans entraves

Les Indiens ne sont pas des jouisseurs. C’est une généralité mais non dénuée de sens. Leur mai 68 ce n’est pas pour tout de suite. Et pourtant, est-ce un mal ? Selon l’article, cet impératif de jouissance déclenché par mai 68 a fait de l’homme occidental un homme déprimé, frustré. Alors…

"Quand l'avenir est incertain, rien de tel que de se raccrocher au passé. Alors que des lycéens battent le pavé pour que rien ne bouge, des seniors commémorent Mai 68 façon anciens combattants. L'International Herald Tribune (daté du 30 avril) s'en amuse, qui relève les querelles bien hexagonales sur l'héritage des barricades. De simples "événements" ou un "mouvement" ? Une "révolution sociale" ou un coup d'épée dans l'eau ? Manières de voir qui déclenchent, pour le quotidien, "une absurdité à la mode" : celle de commémorer à tout-va en demandant à Sonia Rykiel ou Agnès B. leur avis, voire, pour le joaillier Jean Dinh Van, en rééditant un pavé-pendentif en argent pour fêter "quarante ans de liberté".

"Jouir sans entraves", effectivement, qu'ils disaient. Remarquez, on le chantait aussi ailleurs qu'en France, et pas forcément moins bruyamment. C'était dans l'air du temps. Certains, avec recul, objecteront que ce "droit à jouir", au-delà de sa seule connotation sexuelle, remontait à bien plus longtemps : quelque part au tournant des dix-huit et dix-neuvième siècles, quand émergèrent les sociétés individualistes et le principe de plaisir. N'empêche. Les années 1960 et les baby-boomers ont sacralisé l'idéal de jouissance généralisée. Et banalisé son discours.

Quelques années après, et le marché aidant, c'en est même devenu comme un impératif, une injonction. L'individu hypermoderne, qui baigne dans le toujours plus et les excès, est sommé de jouir. A tout prix. De tout, de rien. De son bonheur, et parfois même, pour s'en sortir, de son malheur. De sorte que, presque à son corps défendant, il en redemande, tout excité qu'il est à désirer, mais pas seulement : à se satisfaire, à consommer. On peut l'accepter, le déplorer, le combattre, l'hypermoderne vit dans le règne de la plus-value et de la montée de l'excitation qui accompagne cette quête de la plus-value.

Le psychanalyste Charles Melman l'a décrypté, qui, dans un livre d'entretiens avec l'ancien président de l'Association freudienne internationale, Jean-Pierre Lebrun, a brossé un portrait de l'homme occidental de ce début de siècle (L'Homme sans gravité, Denoël, 2002) : "Sans boussole, sans lest, affranchi du refoulement, moins citoyen que consommateur, un "homme sans gravité", produit d'une société libérale aujourd'hui triomphante." Il en résulterait, selon le psychanalyste, une "nouvelle économie psychique", passés que nous sommes "d'une culture fondée sur le refoulement des désirs, et donc des névroses, à une autre qui recommande leur libre expression". La "santé mentale" relèverait donc aujourd'hui "d'une harmonie non plus avec l'idéal mais avec un objet de satisfaction". On ajoutera "immédiate". Vouloir tout, tout de suite, ici et maintenant, en abondance.

Et, sur ce registre, on entrevoit les dégâts quand la satisfaction n'y est pas - ce qui, somme toute, est assez souvent le cas. Le philosophe Paul-Laurent Assoun prévient d'ailleurs (in L'Individu hypermoderne, Erès, 2005) : "Qu'on ne s'y trompe pas : le discours de l'excès signe régulièrement un "peine-à-jouir"." Dans la civilisation marketing, qui oriente nos pulsions sur tout un tas d'objets de jouissance (un service, un produit, une promotion), le pousse-à-la-jouissance pousse inéluctablement à la frustration.

Tout cela donne les états dépressifs (et la consommation d'antidépresseurs) que l'on sait. Et, comme rien ne se perd, cela donne aussi, en marketing, cette nouvelle veine des marchés dits de la "compensation émotionnelle". Cette tendance qui nous fait, par exemple, téléphoner ou envoyer des SMS pour ne rien dire, si ce n'est... nos frustrations."

Chronique par Jean-Michel Dumay parue dans Le Monde le 03.05.2008