lundi, 09 mai 2016
Un Samouraï à une soirée de l’Ambassadeur
Intéressantes ces soirées chez l’Ambassadeur suisse, en l’honneur de la visite d’un gros bonnet d’une grosse boîte. Une expérience à faire, pas forcément à renouveler (surtout quand on s’est brillamment illustré comme moi ce soir-là)…
D’abord parce qu’une bonne moitié de l’assistance bosse pour la boîte en question, qui ne t’intéresse que moyennement vu que tu n’as pas de projet à court terme de te reconvertir dans l’agriculture.
Ensuite parce que si tu te disais « tiens chouette je vais me faire des copains suisses » tu t’es fourrée le doigt dans l’œil : il y a exactement six pelés suisses dans toute l’assistance... Et puis c’est pas les plus sympas tu vois, ils ont cette petite arrogance de ce qui ont « vécu » l’Inde, tandis que toi, pauvre gourde… C’est comme ça que l’un d’eux m’a demandé depuis combien de temps j’étais ici. Spontanément j’ai répondu 2 mois. Bah t’aurais vu le regard complice que les pelés se sont échangés… J’ai préféré ne pas relever. Enfin si un peu. Mais ce n’est pas tellement un regard d’admiration qui me fut adressée quand je rectifiais la durée de mon séjour en Inde, mais plutôt le genre de regard qu’on balance aux timbrés !
Et puis surtout il faut faire bien attention à ce que tu dis. Pas comme moi quoi. Par exemple, quand son ‘Excellence’ est venu me serrer la main, je n’étais pas encore bien au fait du protocole :
- Lui : Hello
- Moi : Hello
- Lui : Et vous êtes ?
- Moi : Emilie
- Lui : D’où
- Moi (il commence à être un peu indiscret celui-là !) : De France
- Lui : Non, je veux dire quelle entreprise ?
- Moi : Oooops
D’ailleurs la réponse à cette question – réponse que j’affectionne particulièrement parce qu’elle me fait hurler de rire intérieurement à chaque fois – à savoir « je vends des tire-laits » n’est pas du plus bel effet chez Monsieur l’Ambassadeur. En plus comme ils comprennent pas je dois faire pouêt-pouêt avec mes nénés pour expliquer. Tu vois le genre ! Donc finalement je me suis positionnée comme General Manager dans le matériel médical high-tech.
Sinon on peut éviter de placer les commentaires suivants :
« Ah bah si le chef du département légal venait en Inde, il aurait pas droit à une réception comme ça ! »
Ou d’imiter l’accent suisse allemand à voix haute (ça donne à peu près ça : « rrrrrggrrrrrrgrrrr »).
Ou « Ah vous travaillez pour Truc ! Je connais bien, c’est le concurrent de Muche ! ».
Ou « Si on se fait pincer l’Ambassadeur viendra nous sauver ! » (pas top quand l’Ambassadeur en question est juste derrière vous)
Quand on arrive à balancer toutes ces âneries à jeun, il est également recommandé d’éviter de se jeter sur les verres de vin (indien) qui passent et repassent. Pareil pour le gâteau au chocolat – c’est moins grave de passer pour une morphale que pour une pochtronne (et le risque de se discréditer complètement est moins grand), mais ça fait quand même pas très classe… (J’ai essayé de la jouer discrète mais il était trop bon !)
J’étais en pleine forme de Samouraï moi ce soir-là ! Débordante de connerie !!
08:00 Publié dans Expatriation (en Inde et ailleurs), Histoires de Samouraï | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : inde, ambassade de suisse, cocktails de l'ambassadeur | Imprimer | Facebook |
lundi, 02 mai 2016
Un départ en fanfare…
C’est lundi soir. Je n’ai pas mangé de la journée, trop occupée à “boucler” des trucs au boulot (en fait on ne boucle jamais rien mais passons…). J’ai soigneusement préparé les valises ce week-end – c’est fou ce que ça complique de voyager avec un bébé, à commencer par vérifier que les vêtements d’hiver sont à la bonne taille et à finir par plier le lit-bébé !
Je me retrouve donc à 19h30, Bébé Samourai couché, la nounou dans le train, le mari dans le taxi, à fignoler les derniers préparatifs (notamment les provisions de nourriture). Quand j’entends le bébé appeler. Et je ne l’ai pas plus tôt soulevé qu’il me vomit dessus, profusément. Son premier vomi en 16 mois, nous en sommes tous les deux retournés… Et bouche bée. Impossible de faire un pas sans marcher dedans, j’en suis comme deux ronds de flan. Je le lave, le recouche, lave le sol puis moi-même et me remets à mes bagages. L’appétit coupé. Et puis il remet le couvert. Une petite douche pour le nettoyer, il a l’air d’aller mieux, et moi je suis toujours en sous-vêtements. D’ailleurs je vais prendre une douche avant de m’apprêter pour le départ. Il est 22h. J’en profite pour shampooiner le chat. D’aucuns diront que le moment n’est peut-être pas choisi mais je dois aider la pauvre bête à se débarrasser de son espèce de teigne et je n’ai pas eu d’autre moment !
22h30. Le taxi est en bas. J’attrape Bébé Samourai pour l’habiller et il me recolle une galette dessus. Re-douche. Et nous partons !
C’est reparti dans la voiture, le cauchemar ! Le vol de 8 heures vers l’Europe s’annonce très long…
Et voilà-t-y pas que sur un pont d’autoroute, alors que plein de camions sont garés sur le côté et qu’il y a un sacré ralentissement, deux hommes tapent sur le capot, intiment à mon chauffeur de baisser sa vitre, lui pincent la bouche, l’étranglent avec sa ceinture de sécurité. Pendant que je crie de le laisser tranquille, que mon bébé est malade et que j’ai un avion à prendre, ils m’ignorent superbement et l’éjectent de la voiture et l’embarquent. Et puis plus rien. Au bout de cinq minutes j’appelle mon mari et là j’explose. La panique totale. J’ai en fond d’écran les histoires atroces de collègues d’amis braqués au flingue au péage de Gurgaon – histoires auxquelles je ne prête pas attention mais qui visiblement rentrent par une oreille et ne ressortent pas par l’autre. Et puis merde. Je sors du taxi, couverte de vomi, le bébé dans les bras et me mets à crier sur les chauffeurs de camion de me rendre mon chauffeur. Ils ont pas l’air de comprendre ce qui se passe, genre ils sont pas à partie de ce hold-up !
Une voiture s’arrête, puis une autre, et une autre. Un homme dans chaque véhicule. Tous sortent et me demandent « ça va pas Madame ? Qu’est-ce qui se passe ? » Entre un sanglot et un hurlement j’explique que mon chauffeur a été enlevé. Et ils me le retrouvent immédiatement, planqué dans une camionnette juste derrière. Nous repartons, sans un merci pour mon sauvetage héroïque et sans une explication – je n’aurai donc jamais le fin mot de l’histoire. Pourquoi ces camions ? Pourquoi ce bouchon en plein milieu de la nuit ? Pourquoi ces deux hommes en civil qui agressent mon chauffeur ?*
J’arrive au comptoir de la compagnie aérienne, puante et dégoulinante de larmes. Je dois faire peur à voir, surtout au comptoir business. Et là, alors que la situation ne pourrait pas être pire, je ne trouve pas mon passeport. Ah si attends il est là. Et puis voilà-t-y pas que Lufthansa a la bonne heur de surclasser mon mari. Ils pouvaient pas mieux tomber je te jure… Un vol en toute tranquillité avec un bébé endormi presque tout le temps, que demander de mieux ?!
* Il semblerait après coup que les camions étaient garés là pour attendre l’ouverture du péage entre Gurgaon et Delhi à minuit. Et que ce racket est institutionnalisé pour les chauffeurs de taxi qui ne payent pas le péage. Je n’étais donc pas au cœur de la fomentation d’un coup d’Etat ou d’une révolution ou ni même d'une manifestation – les soulèvements sont devenus assez communs dans le coin par les temps qui courent avec les Jats piquant des colères régulièrement (cf cet article du Monde). Pfff... J'ai crisé pour rien !
08:00 Publié dans Histoires de Samouraï, Petit Samourai | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : inde, gurgaon, voyager seule, taxi, péage, jats, manifestation | Imprimer | Facebook |