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lundi, 02 mai 2022

Ma belle-mère indienne et moi - Emeline S

Une coloc indienne sans histoires

Pour le contexte de ce post, voir la note suivante : introduction.

J’ai rencontré mon conjoint lorsqu’il était en France pour deux mois en école de commerce, en 2014. En plus de ces deux mois, il a passé deux semestres à Dubai. Après que nous nous sommes mis ensemble en 2016, je suis venue en octobre et novembre 2018, puis j’ai déménagé en Inde en janvier 2019 juste avant notre mariage février.

Je vis avec mon mari et ma belle-famille à Gwalior, petite ville (seulement un million d’habitants) à mentalité de village au bord du Madhya Pradesh. Vivre avec ma belle-famille était choisi en quelque sorte. Ils ont un business de famille au rez-de-chaussée. Être complètement indépendant sur Gwalior s’est révélé un poil difficile pour moi : nous avons vécu six mois dans un appart pour d’autres raisons, et comme dit, Gwalior est un village, donc ce n’est pas tout le temps facile d’y vivre en tant qu’étrangère ; avoir la belle-famille donne un semblant de légitimité. Nous n’avons pas de perspectives d'aller vivre ailleurs pour le moment.

Ma belle-mère est adorable, pure mère indienne qui vit principalement pour sa famille (même si petit à petit elle commence à prendre du temps pour elle). Dès le début je savais qu’elle était très gentille et pas du genre à dire non à quoi que ce soit, mais plutôt à se sacrifier pour sa famille et le bonheur des autres.

Elle m’a très bien accueillie, et a fait pas mal de compromis, notamment niveau cuisine. Nous avons fait faire un comptoir spécifiquement pour moi afin que je puisse avoir mon espace et que les nourritures ne se mélangent pas (je suis notamment intolérante au gluten), puis il a été accepté que je cuisine non végétarien (elle est pure végétarienne, mais mon mari et beau-père aiment bien du poulet et des œufs de temps en temps).

Je peux également m’habiller comme je veux à la maison ; elle comprend bien que l’été, cela peut être difficile pour moi d’être couverte de la tête aux pieds. Et depuis que je suis là, elle-même évolue  niveau vestimentaire : elle met de plus en plus de jeans et même des shorts en vacances !

J’ai maintenant une fille de 4 mois, et j’avoue que c’est bien d’avoir de l’aide pour s’en occuper : je peux prendre ma douche presque tranquille, et cuisiner également sans trop de problème.

Après, tout n’est pas facile forcément.

Mon hindi n’est pas top et son anglais encore moins bon, mais depuis le temps, on arrive maintenant à communiquer sur pas mal de choses (notamment pour se plaindre des maids et de la tante du dessus).

Bien sûr, il y a des jours où j’aimerais être juste avec mon mari et ma fille, avoir plus de vie privée, mais d’un autre côté, avoir quelqu’un a la maison est une très grande aide.

Elle essaye de suivre pas mal ce que je fais avec ma fille comme activités d’éveil (ce qui n’est pas du tout indien) et au moins ma fille a sa dose d’hindi quotidienne vu que mon mari travaille beaucoup et donc ne passe pas énormément de temps avec elle.

Il y a beaucoup de petites choses qui m’énervent. Par exemple, elle a la manie de tout ranger directement, dès qu’on nous offre un cadeau, il part direct dans les placards, et on oublie que ça y est. Et puis elle est très active le matin et moi pas du tout, mais elle visiblement, elle ne comprend pas qu’on ne puisse pas être du matin – un concept qui n’existe pas en Inde, on se lèvre avec les poules, voire même avant. Alors elle me demande plein de choses à faire alors que je dors encore à moitié. Enfin, quand ma fille pleure, elle vient presque tout le temps pour voir ce qui se passe (même si c'est juste à cause d’un lavement de nez). Ça part d’une bonne attention, mais des fois, c’est un peu trop etc... Ce sont des ajustements à faire, comme avec n’importe quel coloc ; ils sont parfois plus ou moins facile à accepter, suivant mon degré d’état de fatigue de jeune maman, mais dans l’ensemble, je n’ai pas à me plaindre, et les compromis que je dois faire ne me semblent pas disproportionnés. Nous nous respectons mutuellement, et faisons en sorte que ça marche. D’autant que le plan est de rester en Inde, en tout cas si ma santé le permet.

Emeline S

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lundi, 25 avril 2022

Ma belle-mère indienne et moi - Marine

Une belle-mère immigrée envahissante

Pour le contexte de ce post, voir la note suivante : introduction.

Nous habitons au Canada, à Toronto. Laissant toute leur famille en Inde, mes beaux-parents y ont emménagé il y a une vingtaine d’années. Mon mari se sent plus Canadien qu’Indien maintenant. Ses parents ont apparemment eu quelques amis quand ils ont déménagé au début, mais ils ont par la suite arrêté de les voir (déménagements et embrouilles, à ce que j’ai compris). Ils sont semi-retraités, donc encore un peu occupés avec leurs emplois respectifs qui comblent leur vie sociale inexistante. C’est un peu dommage, car il y a une grande communauté d’Indiens au Canada et la société est très ouverte. S’ils le voulaient, ils pourraient avoir beaucoup d’amis.

Le frère de mon fiancé est lui-même marié à une blanche mais il a déménagé bien loin. Mon mari, lui, ne veut pas quitter Toronto où il a sa vie. J’ai pensé suivre la voie de mon beau-frère et mettre un peu de distance entre mes beaux-parents et nous mais cela pourrait être à double tranchant : ils risqueraient de nous suivre, et cette fois se mettre en ménage avec nous d’autorité.

Il ne vivait déjà plus avec ses parents quand je l’ai connu. Il m’a cependant avoué plus tard que, lorsqu’il a acheté sa maison, ses parents avaient demandé à emménager avec lui. Il avait refusé, car justement il voulait expérimenter la vie seul à 30 ans. Ça n’a aussi jamais été dans son intention de vivre avec eux ; alors que ses parents (surtout sa mère) nourrissait le rêve que leur fils cadet épouse une Indienne pour emménager avec lui une fois marié. Mon amoureux a refusé toutes les femmes qui lui ont été présentées par sa mère, car il croyait en l’amour.

 Lui, il est prêt à les héberger si un jour ils ont des problèmes de santé, mais sinon, il tient à son intimité et indépendance. Enfin, quand je dis « la vie seul à 30 ans »… Il a choisi un hébergement à 5 minutes à pied de chez eux, et quand nous nous sommes rencontrés, il allait les voir tous les jours. Quand je suis arrivée dans sa vie, il s’est mis à espacer un peu les visites à… juste plusieurs fois par semaine quand même. Il ne les a pas abandonnés non plus ! Pour autant, le changement a été très mal vécu par ma belle-famille...

Quand la question s’est posée de vivre ensemble, j'ai clairement été contre. Je ne suis pas opposée à l’idée d’une maison multigénérationnelle où chacun a sa cuisine et sa salle de bain, mais on est déjà géographiquement proches en cas de besoin. Mais non, eux, ils voulaient vraiment vivre avec nous et TOUT partager... Pour moi, c’était hors de question.

Mon mari et moi, nous avons beaucoup discuté de la pression sociétale et familiale. Sa famille avait des attentes pour lui, il devait si plier, point barre. Sauf qu’heureusement, il s’est défendu (mais on s’est quand même quittés 2 fois avant de nous marier). Voici un exemple récent : il a voulu s’acheter une nouvelle voiture, son père trouvait que ce n’était pas un bon investissement. Mon copain a quand même décidé de l’acheter (après tout, il a 36 ans et gagne bien sa vie). Sa famille a fait une crise : « Tu ne respectes pas la parole des aînés, blablabla. » Bref, il devrait faire en fonction d’eux tout le temps, j’avoue que cela me dépasse. Je pense que ça lui a ouvert les yeux cette histoire : son père a dit qu’il ne voulait plus nous voir pendant quelques mois à cause de ça, bon, dans les faits, il est revenu vers nous après une semaine.

Je me suis souvent demandée si toutes ces contraintes, en tous cas, quand je me base sur ma belle-famille, viennent du fait qu’ils sont issus d’un mariage arrangé. Mes beaux-parents s’entendent bien, mais ils n'ont pas l’air super épanouis pour autant. J’ai l'impression qu’ils vivent par procuration la vie de leur fils. Ils ne sortent pas, n’ont pas d’amis (absolument aucun) et toute leur vie tourne autour de leur famille. Sauf que le frère de mon mari habite loin, donc toute l’attention est tournée vers mon mari. Il est plus que leur fils, il est leur entière vie sociale. En raison du COVID, on a commencé à vivre ensemble avant de nous marier (le drame, là aussi, haha). Ses parents venaient nous voir tous les jours, à l’improviste. Et souvent, ils faisaient un tour de la maison d’abord pour vérifier que tout était en ordre. Le choc quand tu vois des gens dans ton jardin à 9h du mat’ alors que tu es en pyjama à regarder la tv dans le salon. Heureusement que je ne portais pas de nuisette, haha. Ou alors la fois où ils sont entrés sans s’annoncer (la sonnerie ne marchait plus, ils ne nous avaient pas prévenu qu'ils voulaient passer) et ils sont juste entrés. Bref, on regardait un film dans le noir et là, on a vu deux ombres dans le coin du salon. On a hurlé de peur... Mais imagine si on ne regardait pas de film et étions dans un moment intime...

Ça aussi, ça a été une goutte d’eau. Pour eux, pas besoin de s’annoncer, ils peuvent venir quand ils veulent et entrer sans avoir à frapper, parce qu’ils doivent se sentir « welcomed », bienvenus, chez eux chez nous. Heureusement, mon fiancé a fini par réaliser qu’ils était un peu oppressants et collants. Mais ils me font encore peur, je ne me sens pas toujours à l’aise en leur présence. J’ai l’impression qu’il y a toujours un drame qui pourrait se déclencher pour n’importe quelle bricole, car ils interprètent le monde à leur façon et si on ne va pas dans leur sens, tout de suite, c’est la crise.

C’est tellement à mille lieux de ma famille qui est très ouverte d’esprit, m’a toujours donnée beaucoup de liberté... Ma grande peur, c’est qu’ils trouvent une excuse un jour pour venir vivre avec nous (du genre un petit problème de santé, c’est la seule raison pour laquelle mon fiancé pourrait dire oui).

Son père est très patriarcal et veut prendre toutes les décisions. Il est aussi assez franc et direct, donc pas de faux-semblants avec lui. J’apprécie cette qualité même s’il paraît souvent bourru et ne cherche jamais à sociabiliser. Sa mère est plus sociable mais très hypocrite. Surtout, elle est hyper contrôlante : elle veut tout faire pour « aider » mais, en réalité, elle veut juste tout contrôler et combler son propre quotidien pas très occupé, je pense. Elle n’hésite pas à manipuler et faire culpabiliser.

Je sais qu’ils ont un peu « changés » depuis qu’on est ensemble. Mon copain s’est battu pour nous, donc ils ont compris qu’ils allaient peut-être le perdre s’ils continuaient. Mais cela reste très pesant pour moi. J’ai parfois l’impression de vivre dans un mauvais film. Je trouve que la société indienne est beaucoup construite autour de la psychogénéalogie, avec tellement de pressions familiales et de poids des traditions et du passé.

Je n’envisage pas d’un jour aller vivre en Inde, et mon mari non plus, ce qui tombe plutôt bien ! Je pense que le fossé culturel serait trop grand pour moi. Sa mère lui a proposé un jour de retourner en Inde, il a dit non. Sa vie est ici et il me dit que même quand il parle hindi, il a un accent, donc on le fait un peu se sentir comme un étranger en Inde. Je suis aussi très indépendante et je pense qu’en Inde, conduire ou sortir seule peut-être compliqué/dangereux (je me base sur les dire d’une amie à Delhi, mais je sais que ça ne reflète pas tout le pays).

Je n’appelle pas mes futurs beaux-parents « papa » et « maman ». Ils m’ont demandé de le faire le jour du mariage, devant ma famille, sans même nous en avoir parlé au préalable à moi et mon mari. D’abord mes parents se sont sentis offusqués, et ensuite, on trouvait ça culotté de nous demander ça alors qu’ils ne me traitent pas comme leur fille. Je sais que ma belle-sœur le fait. Moi, je les appelle par leurs prénoms et c’est ok comme ça. Mon fiancé ne m’a jamais demandé de le faire et je refuserais de toute façon.

Je pense sincèrement que le fossé générationnel et culturel est trop grand entre mes beaux-parents indiens – malgré leur vie passée en Occident – et les nouveaux couples mixtes comme le mien. Ce n’est pas si grave de ne pas se comprendre, du moment qu’il y a de l’acceptation et du respect. Dans mon cas, il est attendu de moi que j’annihile toute ma culture française et devenir indienne… Il n’y a pas d’espace pour les compromis dans ma belle-famille. Donc forcément, ça ne passe pas.

Marine

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lundi, 18 avril 2022

Ma belle-mère indienne et moi - Emeline T

Une relation longue distance ; loin des yeux, près du cœur

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Pour le contexte de ce post, voir la note suivante : introduction.  

J’ai rencontré mon conjoint sur une application pour apprendre l’anglais. L’application permettait de « lancer une bouteille à la mer » pour trouver des correspondants dans le monde afin d’échanger en anglais. Nous avons discuté en ligne pendant plusieurs mois avant que j’aille le rencontrer en Inde et depuis, on ne s’est plus quitté.

Je vis à la Réunion et ma belle-mère vit à Bangalore. 

Ma belle-mère, c’est une femme que je respecte plus que tout au monde. A 16 ans, elle était mariée, à 20 ans elle avait déjà deux enfants. Elle a accouché seule, sans son mari. Elle a fait des sacrifices énormes pour que ses enfants aient un meilleur futur. Elle travaille dur tous les jours pour que la maison reste propre et que le business familiale soit florissant.

Elle n’a pas été beaucoup à l’école mais c’est une femme intelligente. C'est la reine de la maison, et tout le monde la respecte. Elle a élevé ses enfants mais aussi ceux de son beau-frère. Malgré la culture dans laquelle elle a grandi, elle a su se démarquer des autres grâce à son ouverture d’esprit. Elle a su m’accepter malgré les on-dit et à m’accueillir comme sa fille.

Je l’ai rencontrée une fois pendant une semaine lors d’un voyage en Inde. Ensuite, nous nous sommes pas revues, notamment à cause du COVID. Cette année, mon mari qui vit hors d’Inde depuis début 2019, est rentré en Inde pour la première fois en 2 ans. Elle n’était pas présente pour notre mariage qui a eu lieu en France mais nous comptons faire une cérémonie en Inde l’année prochaine.

Même si je n’ai jamais passé beaucoup de temps avec elle, et nous communiquons surtout par téléphone alors même que nous ne parlons pas la même langue. Mais, malgré tout, je sais combien elle m’aime car ce sont toutes les petites attentions qui comptent. Par exemple, à chaque fois qu’elle voit un joli bijou, elle l’achète pour moi, pour la prochaine fois qu’on se verra. Elle s’inquiète quand je suis malade ou en colère. Elle est triste quand je ne l’appelle pas.

Ma belle-mère pourrait me vouer une haine sans nom, pour lui avoir « pris » son fils aîné, pour l’avoir emmené loin au bout du monde mais c’est un ange avec un bon cœur. Maintenant, mon but est de la rendre heureuse comme elle a rendu heureux ceux autour d’elle. D’ailleurs, depuis que mon mari a un CDI, nous lui construisons une maison pour qu’elle soit à l’aise. C’est ma belle-famille qui a supervisé toute la construction en Inde et ils ont mis une salle de bain européenne et une chambre, pour être sûrs que nous nous sentions bienvenus chez eux (qui est aussi chez nous, visiblement). Je trouve le geste très beau, même si cela me surprend un peu qu’ils puissent croire que nous allons un jour vivre tous ensemble. Ils semblent avoir beaucoup d’espoirs que nous emménagions.

Quant à mon mari, il aimerait rentrer en Inde vivre avec eux mais il voit bien que ma manière de vivre ne pourrait pas facilement coller : je suis une femme active, je fais beaucoup d’activités et j’aime beaucoup mon métier de professeur. Si je trouvais un job de prof en Inde me permettant de gagner ma vie et garder mon indépendance, je pourrais éventuellement envisager de franchir le pas.

Nous verrons bien comment les choses évoluent. Je n’ai pas vraiment de projets fixes. Je reconnais que j’appréhenderais un peu à vivre avec ma belle-mère, surtout si elle s’avérait directive.

Emeline T