samedi, 14 février 2015
Bébés made-in-India – 7. Le lange et la couche
Une autre tradition qui a la peau dure c’est de langer/emmailloter son bébé. Les avantages prônés sont la création d’un sentiment de sécurité pour le bébé (ça lui rappelle l’utérus), et un meilleur confort grâce au contrôle des mouvements-réflex qui peuvent le déranger. Pour la mère, ça fait un truc plus pratique à porter, un petit paquet bien tranquille. Total, en Inde, les petits sont emmaillotés la plupart du temps jusqu’à trois mois. En sus des bénéfices mentionnés ci-dessus, ils pensent aussi que cette technique permet aux jambes de se développer bien droites. Et les problèmes de hanche que ça peut entraîner sont royalement ignorés.
La pratique du lange rassurant de fait certains nourrissons, on peut choisir une solution intermédiaire, comme emmailloter le bébé pendant les temps de repos – il est d’ailleurs intéressant de savoir que cette pratique, passée de mode pendant plusieurs décennies voit maintenant son blason redoré en Occident (6).
Si on décide de laisser le bébé les jambes libres quand il ne dort pas, il faut alors être prêt, quand on passe la porte en portant le nouveau-né ‘monkey-style’, à affronter les regards outrés des portiers, voire leurs commentaires : « Mais faut pas le porter comme ça malheureuse ! Le pauvre !! Ses jambes !! ». Ou à supporter le vendeur de Benetton qui est susceptible de s’offusquer, à plusieurs reprises, qu’on utilise un porte-bébé pendant les six premiers mois…
Pour en revenir au lange, j’imagine que cette pratique va de pair avec l’usage de la couche indienne en coton. Il s’agit en effet d’une espèce de bout de tissu (qui tient à peine en place) et dans lequel on glisse des morceaux de tissu pour absorber. Les avantages de cette couche c’est que c’est plus doux pour les fesses de l’enfant, moins cher et plus écolo (mais je suis pas sûre vu que tu dois passer ton temps à laver des trucs), et que l’enfant apprend plus vite à ‘être propre’, étant donné qu’il en a vite marre d’avoir le cul mouillé en permanence. J’ai bien essayé plusieurs fois à l’hôpital mais y a rien à faire, je ne comprends pas comment le gosse ne s’en met pas et n’en met pas partout si il bouge un tant soit peu (ce qui n’arrive sans doute pas avec un emmaillotage bien serré comme il faut)…
Mais bon la se
ule vraie technique écologique et économique reste encore de laisser les gosses cul-nu. Très en vogue dans les campagnes où les bébés sont assez vite livrés à eux-mêmes ou aux feux rouges où les tout-petit-tout-nus attendrissent et assurent une piécette supplémentaire (d'où business juteux de trafic d'enfants : cf note)...
(6) 9 enfants sur 10 en Amérique du Nord seraient langés et les ventes de vêtements appropriés auraient augmenté de 61% entre 2010 et 2011 au Royaume-Uni. (Source : http://www.theguardian.com/society/2013/oct/28/swaddling-babies-blankets-hip-problems-doctors-warn)
(A suivre…)
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jeudi, 12 février 2015
Bébés made-in-India – 6. La médicalisation de la naissance
70% des bébés indiens naissent à la maison, avec l’aide d’une sage-femme (dai). Paradoxalement, les hôpitaux ‘modernes’ (on trouve à manger et à boire en terme d’infrastructure avec certaines options au moins au niveau de l’Europe si ce n’est mieux) ne reconnaissent pas cette profession ! Résultat, ma sage-femme (britannique) se voit souvent interdire l’accès à la salle d’accouchement, ou refuser de faire équipe avec le gynéco (qui dans tous les cas reste le boss et ne la consulte pas pendant la naissance).
Les Indiens ont tendance à faire confiance aveuglément aux médecins. C’est ainsi que la pratique de l’épisiotomie (petit découpage vaginal des maisons préventif), en forte régression en Occident (5), reste très largement répandue. D’ailleurs presqu’aucune mère ne sait que c’est optionnel ; j’irai même plus loin en disant que presqu’aucune nouvelle mère ne sait que ça va lui arriver ! Elles ne sont pas à blâmer : même ma gynéco n’a jamais mentionné l’épisiotomie et ce n’est que grâce à ma sage-femme que j’ai découvert ce que c’était…
Par ailleurs, les Indiennes sont très peu au fait de l’anesthésie pendant l’accouchement. Je n’ai d’ailleurs pas trouvé de statistiques, à part un petit sondage qui confirme mon opinion. La plupart des Indiennes auxquelles j’évoque la péridurale n’en ont jamais entendu parler et n’arrivent pas à concevoir qu’on puisse accoucher sans sentir les contractions – interrogation valable, à laquelle je n’ai eu la réponse qu’après mon accouchement !
C’est ainsi qu’aujourd’hui près de la moitié des accouchements sont des actes de chirurgie (contre 21% en France, 25% en Angleterre)… Et à la campagne comme à la ville.
Plus marquant encore, c’est l’augmentation des césariennes planifiées (vs les césariennes médicalement nécessaires). Les responsables ? Un peu tout le monde. Pour les médecins c’est plus rentable (ils facturent plus les actes chirurgicaux), plus facile à caler dans l’agenda et (certains le plébiscitent) moins risqué pour la patiente. Pour les femmes c’est souvent remboursé par des assurances privées, perçu comme moins douloureux, plus facile à caler dans l’agenda (notamment lorsqu’il y a des impératifs astraux, ça permet que le bébé naisse avec une bonne configuration de planètes (je blague pas !)) et (certaines le croient) moins risqué. M’est d’ailleurs avis que ma belle-mère imaginait que le sort me réservait une césarienne lorsque j’allai consulter ma gynéco le jour du terme – ca faisait déjà plus d’une semaine qu’elle était là à Mumbai à trépigner, il était peut-être temps de passer aux choses sérieuses !
(5) En France, « le taux d’épisiotomie a baissé de 71 à 45 % entre 1998 et 2010 ».
Sources : http://www.midwiferytoday.com/articles/india.asp ; http://www.liberation.fr/vous/2011/10/18/70-d-accouchements-avec-peridurale_768628 ; http://www.who.int/healthsystems/topics/financing/healthreport/30C-sectioncosts.pdf ; http://www.huffingtonpost.com/2014/04/16/c-section-rates_n_5161162.html?ir=India ; http://qz.com/326402/cesarean-births-in-india-are-skyrocketing-and-there-is-reason-to-be-very-worried/; http://www.cesarine.org/avant/etat_des_lieux.php ; http://www.hscic.gov.uk/catalogue/PUB12744/nhs-mate-eng-2012-13-summ-repo-rep.pdf; http://www.liberation.fr/vous/2011/10/18/70-d-accouchements-avec-peridurale_768628
(A suivre…)
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mardi, 10 février 2015
Bébés made-in-India – 5. Versus les moeurs françaises
Comme y a pas de mal à se faire dorloter, ces coutumes du retour au bercail maternel, de l’isolation et de l’alitement persistent à travers les âges et les classes sociales. Plusieurs fois je demandai à des collègues nouvellement élevés au rang de père s’ils n’étaient pas trop fatigués. Et m’entendais répondre « ah nan tu sais ma femme et le bébé sont dans ma belle-famille, ils ne rentreront qu’au bout de trois mois ! ».
On est bien loin de l’ ‘isolement’ de la nouvelle mère française (quoique apparemment (d’après Tracy Hogg) cette période des 40 jours existe aussi en Angleterre)) qui va devoir vite tout faire toute seule : la bouffe, le ménage etc., en plus de s’occuper du nouveau-né. Voilà ce que j’essayais d’expliquer à mon entourage indien : moi, femme d’affaires indépendante et fille de femme d’affaires indépendante, j’étais génétiquement programmée (sauf complication médicale) pour me débrouiller vite toute seule. Et puis avec les ‘services’ que l’on trouve en Inde, i.e. employés de maison, livraisons de courses et de repas, c’est quand même plus facilement gérable qu’en Occident.
Quant à l’accouchement, l'homme indien n'est traditionnellement pas convié à y assister - comme ce fut le cas jusqu'aux années 50 en Occident où le débat n'est d'ailleurs pas encore clos quant à la nécessité et bénéfices de la présence du père (mais au moins le choix est libre)... Donc on se retrouve avec comme soutien la mère ou la belle-mère en salle de travail.
Et puis après il faut aussi quelqu'un pour aider vu qu'il existe des maternités qui ne servent pas à manger. Ainsi, la mienne (de belle-mère) proposa gentiment de rester à l’hôpital avec nous la première nuit (4)… Pour elle c’était son rôle de se lever la nuit quand le bébé pleure ; pas le mien, ni celui de son fils ou des infirmières. Pour me le passer afin que je le nourrisse. Enfin c’était le rôle de ma mère, présente mais visiblement pas décidée à se dévouer ! Ma mère dut en effet paraître bien inconsidérée en entrainant son homologue dans des virées shopping quotidiennes au lieu de squatter notre chambre d’hôpital ! En fait elle faisait son boulot de mère de Samouraï, à savoir s’assurer qu’on ait un peu d’intimité tous les trois…(Et ‘intimité’ c’est un mot qu'existe pas dans le dico (indien), alors que c’était pourtant le maître mot de notre plan de naissance !!)
Quant à notre hôpital, nous avions choisi le nec plus ultra : non seulement ils servaient à manger mais en plus nous avions une nutritioniste et une experte en allaitement pour nous aider à faire la transition ! En plus, en imposant des horaires de visite strictes, ils s'affichaient 'pro-intimité' et innovateur (normalement, une fois le bébé mis au monde, toute la famille se déplace. T'imagine même pas le chaos !). Et il y avait pléthore d'infirmières pour nous aider et s'assurer que notre intimité ne soit pas trop complète !!
(4) Fait appréciable en Inde, chaque patient a le droit d’avoir un proche qui reste la nuit – le personnel hospitalier te regarde même d’un drôle d’air si, pauvre Rémi-sans-famille (c’est-à-dire l’expatrié moyen), tu n’as personne à tes côtés – et je suis sûre que ce soutien aide à la guérison.
(A suivre…)
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