Pendant ce temps, en Inde... - Le Covid vu par une Française en Inde 29.04 (jeudi, 29 avril 2021)

29 avril – La vie au ralenti

Maintenant que nous allons tous mieux à la maison, je vais arrêter de me regarder le nombril et voir ce qui se passe dehors. Enfin, dehors… Je suis en quarantaine, je ne peux pas sortir, alors ça va être quand même un peu limité.

Nombre de cas. L’Inde enregistre plus de 350 000 cas par jour. Mais en fait il y a un battement d’au moins 3 jours, car les résultats de test mettent plus de 72 heures à arriver. Et c’est la croix et la bannière pour se faire tester, alors ce n’est pas dément de penser que les chiffres sont largement sous-estimés. C’est bien simple, pendant la dernière vague, je pouvais compter sur les doigts de la main le nombre de gens que je connaissais qui l’avaient attrapé, et cette fois c’est l’inverse ; je ne connais presque personne qui ne l’ait pas chopé.

Vaccins. Le Premier Ministre a réitéré qu’il n’y avait pas de rupture de stock. Pour autant, à Mumbai, des gens attendent leur 2ème dose et vont faire la queue quotidiennement à l’hôpital, en vain. Au moins avec cet exercice, ils risquent de finir immunisés quand même. Le Covaxin, vaccin indien de l’entreprise Bharat, serait plus efficace avec le variant indien (B.1.617) à double mutation. Mais les chiffres indiquent que les variants sévissent différemment selon les régions indiennes (source) :

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Enfin, le Gouvernement français est en train de recenser le nombre de doses de vaccins Moderna à envoyer pour les ressortissants français en Inde et leurs conjoints. Mais il faut ne pas avoir eu le Covid depuis le 1er février, ça va considérablement réduire le nombre de doses.

Oxygène. Et bien c’est toujours la pénurie. Hier, les voisins couraient à droite à gauche pour recharger leurs bonbonnes. En vain. Il paraît que les flics empêchaient l’accès aux camions, apparemment pour éviter le marché noir – qui fleurit comme ce n’est pas permis. Et les escroqueries aussi d’ailleurs. Mais aussi la charité. Une association (Hemkunt foundation source) fait parler d’elle, qui se concentre sur l’oxygène et offre un « drive-through » : tu arrives, tu respires autant que tu as besoin et tu repars. Ça commence à s’organiser sur le sujet, avec l’aide internationale (encore faudra-t-il qu’elle arrive à bon port, on sait ce qui arrive aux rations alimentaires et toute autre aide locale…) mais surtout des individus et des entreprises qui se lancent dans la fabrication d’usines à oxygène.

Médicaments. Les pharmacies à Gurgaon ne livrent plus, trop de boulot. Sur les réseaux, les gens cherchent du Remdesivir, Fabiflu, plasma et bien sûr de l’oxygène. En Inde, quand tu es admis à l’hôpital, tu dois te débrouiller pour acheter les médicaments – souvent tu les trouves à la pharmacie dudit établissement, mais pas toujours…

Traitement :

  1. Le double masque si on doit sortir, et avant d’être infecté et placé en quarantaine
  2. Vitamines B, C et Zinc + paracetamol
  3. Stéroïdes aussi souvent recommandées dès que les poumons sont atteints
  4. Beaucoup d’hydradation, mais pas d’eau froide
  5. Passer au moins 3-4 heures par jour allongé sur le ventre pour soulager les poumons
  6. Continuer à faire un peu d’exercice, y compris de respiration, surtout si vous êtes en isolation et ne bougez quasiment pas

Riches et pauvres sont aujourd’hui dans la même galère. Dans sa pleine bonté d’âme, une de mes voisines s’est indignée de la pénurie de vaccins : « Ils n’ont qu’à le faire payer 6000 rs (70€ alors qu’aujourd’hui il est disponible gratuitement dans les établissements gouvernementaux et jusqu’à 2 400 rs dans le privé, par dose) et au moins on sera sûr d’en avoir. Et puis on ne sait pas quoi faire ni qui appeler pour réserver un lit à l’hôpital, tu te rends compte ? » L’argent aide quand même à se procurer de l’oxygène ou du matériel médical au black ; j'avais hurlé de rire en février dernier quand un collègue (obèse, diabétique et surtout imbuvable) m'avait parlé de la chambre de soins intensifs qu'il avait fait installer chez lui. Aujourd'hui, je trouve ça nettement moins drôle, c'est même une des dernières alternatives quand on ne trouve pas de lit d'hôpital, qu'on a les moyens et qu'on trouve les ressources. Certains hôpitaux ont également des partenariats avec des hôtels, pour des traitements basiques, et tous proposent des consultations en ligne. (Attention, les médecins ont souvent la main lourde sur les médicaments...)

Et les réseaux aident à se trouver un lit. Notre ghetto abrite un propriétaire de labo et nous avons la chance d’avoir une collecte de tests organisée une ou deux fois par semaine. Des fois pour les résidents, des fois pour le staff, des fois pour les deux. Ils arrivent aussi à organiser des campagnes de vaccination de temps en temps.

Fric et relations ne garantissent pourtant pas l’accès aux soins, et ça reste très difficile pour tout le monde. Évidemment c’est encore plus difficile pour les plus démunis. D’autant qu’en termes d’information, nous ne semblons pas vivre sur la même planète. Ma femme de ménage est très très loin de comprendre la gravité de la situation par exemple, et voulait rentrer chez elle, au mépris du risque de transmission à son mari, ses autres proches ou le chauffeur de taxi. Et je suis sûre qu’ils sont des millions à se dire encore, et jusqu’à ce soit trop tard, « c’est qu’une mauvaise toux », puisque les sales trucs qui traînent, ils ont l’habitude…  Bref, c’est absolument horrible ce qui se passe.

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15:39 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : inde, corona, coronavirus, virus, covid, épidémie, hôpitaux |  Imprimer |  Facebook |